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L’inconscience de soi
14/08/2013

La précocité de la prise en charge des patients Alzheimer permet d'améliorer leurs conditions de vie à domicile, du moins de façon provisoire. Toutefois, le fait que nombre d'entre eux ne se rendent pas compte ou minimisent les troubles cognitifs qu'ils présentent est de nature à contrarier ce projet. Durant sa thèse de doctorat, Haroun Jedidi s'est intéressé à ce symptôme complexe et perturbateur baptisé « anosognosie ».

Sur le plan neuropathologique, la maladie d'Alzheimer se caractérise par la présence dans le cerveau de deux types de lésions neurodégénératives : les plaques amyloïdes extracellulaires et les lésions de dégénérescence neurofibrillaire intracellulaires. Depuis une vingtaine d'années, des traitements symptomatiques sont disponibles. Leur succès est cependant mitigé, dans la mesure où leur action bénéfique est variable, se révèle souvent limitée dans le temps et que leurs effets secondaires ne sont pas négligeables. De plus, tous les malades n'y répondent pas de façon sensible.

Parallèlement à la prise en charge médicamenteuse, des techniques de réhabilitation cognitive sont proposées aux patients. Elles misent, dans chaque cas particulier, sur l'utilisation des facultés préservées de l'individu pour l'aider à pallier certains de ses déficits au cours des activités quotidiennes et, partant, sauvegarder plus longtemps son autonomie. De la sorte, d'aucuns réapprennent par exemple à se servir d'un GSM ou à cuisiner, activités pour lesquelles ils éprouvaient des difficultés. Ces malades se sentent alors confortés dans leur estime d'eux-mêmes au sein de leur environnement.

Une chose est sûre : que ce soit au niveau du traitement médicamenteux, aujourd'hui symptomatique, demain peut-être curatif, ou à celui d'une prise en charge de réhabilitation cognitive, une détection précoce de la maladie d'Alzheimer améliore le pronostic fonctionnel. Intervenir rapidement permet de mieux adapter l'environnement aux difficultés toujours croissantes rencontrées par le malade et d'optimiser son attitude et celle de ses proches devant l'évolution de sa maladie. Dans l'hypothèse d'un futur traitement curatif, agir tôt permettrait d'enrayer les progrès de la maladie dès les premiers symptômes de l'affection et, à défaut de restaurer les facultés perdues, stabiliserait l'état du patient avant qu'il n'accuse d'importants déficits sur les plans mnésique (mémoire), cognitif et/ou comportemental.

Conscience de soi

Lorsqu'un patient n'a pas conscience de ses déficits (qu'ils soient physiques ou cognitifs) ou n'en possède qu'une conscience limitée, on parle d'anosognosie. Ce phénomène se rencontre assez fréquemment au cours des démences - maladie d'Alzheimer, démences frontales ou fronto-temporales... -, mais aussi dans d'autres pathologies. Anosognosie2Par exemple lorsque, à la suite d'un accident vasculaire cérébral, des lésions de régions cérébrales intervenant au niveau de la représentation du corps dans l'espace débouchent sur un tableau clinique d'héminégligence : le patient fait alors abstraction de toute une partie de son corps et de son environnement sans le savoir. « Ainsi, il pourra par exemple ne se raser qu'un seul côté du visage », précise le docteur Haroun Jedidi, assistant au service de neurologie du CHU de Liège et aspirant FNRS auprès du Centre de recherche du Cyclotron de l’Université de Liège.

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