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55 Cancri e : d’énormes variations de température !
11/05/2015

Pour la première fois, une équipe de scientifiques des Universités de Cambridge et de Liège (Michaël Gillon, chercheur qualifié FNRS au Laboratoire sur les ORigines en Cosmologie et Astrophysique de l’ULg) ont détecté une variabilité de température de grande ampleur sur une planète rocheuse située en-dehors de notre système solaire(1). Ils ont en effet mesuré une augmentation de la température de la planète de pratiquement 300% sur une période de deux ans. Tout en insistant sur le caractère préliminaire de leurs conclusions, les chercheurs jugent hautement probable que cette variabilité soit due à une intense activité volcanique à la surface de la planète. Ces résultats démontrent pour la première fois que les planètes telluriques en orbite autour d'autres étoiles que le soleil peuvent elles aussi avoir une activité géologique et une variabilité atmosphérique considérables. C’est en quelque sorte le premier « bulletin météo exo-planétaire » qui vient ainsi d’être dressé.

55 cancri e55 Cancri e, Michaël Gillon, chercheur qualifié FNRS au Laboratoire sur les Origines en Cosmologie et Astrophysique de l’ULg la connaît bien : en 2012, l’astrophysicien liégeois avait en effet co-signé un important article paru dans The Astrophysical Journal Letters (2) qui rendait compte de la première observation de l’émission thermique d’une super-Terre, en l’occurrence 55 Cancri eexoplanète découverte en 2005 par des télescopes au sol. Elle orbite autour d'une étoile similaire au Soleil (55 Cancri A) située à 40 années-lumière dans la constellation du Cancer. Pour arriver à mesurer cette émission thermique (luminosité) de l’exoplanète, Michaël Gillon et ses collègues avaient déjà eu recours au télescope spatial Spitzer (lire l’article  Une super-Terre mise en lumière ). Comme la planète est très proche de son étoile, il est impossible d’en obtenir une image directe avec les technologies actuelles. En effet, sa lumière est noyée dans celle de son étoile. Néanmoins, le fait qu’elle soit cachée par son étoile une fois par orbite, rend possible la détection indirecte de son émission lumineuse, par la mesure précise du flux combiné de l’étoile et de la planète. Il y a en effet une baisse du flux enregistré par le détecteur lorsque la planète est cachée par l’étoile, c’est-à-dire lorsque son émission est occultée. Cette baisse de flux de l’ensemble étoile + planète correspond à la contribution de la planète, et sa détection donne donc accès à la mesure de l’émission lumineuse de la planète. Cependant, comme le contraste attendu entre la planète et l’étoile est minuscule dans le spectre visible, de l’ordre de 1 millionième, ce qui est indétectable par les instruments actuels, les scientifiques avaient effectué leur mesure dans l’infrarouge, là où le contraste est nettement plus favorable, de l’ordre du centième de %. Dans cette partie du spectre électromagnétique, l’émission de la planète est dominée par son émission thermique propre et non par la lumière stellaire qu’elle réfléchit.

Diamant ?

Comme le signalait alors Michaël Gillon, tout concordait pour faire de 55 Cancri e le candidat idéal pour des observations supplémentaires. Tout d’abord, l’étoile n’est pas trop éloignée de notre Terre et est donc très brillante. La présence très proche de 55 Cancri e par rapport à son étoile implique qu’elle est fortement irradiée, ce qui influe sur sa température effective, et en fait une planète « hot ». A titre de comparaison, là où la Terre a une température de 300 kelvins (K), et Jupiter de 100 kelvins, l’exoplanète étudiée, elle, dépasse les 2000 kelvins, comme le montre la mesure effectuée par Spitzer. Cette température est supérieure au  point de fusion de la plupart des métaux!

Ces caractéristiques ont effectivement attiré de nombreuses équipes à travers le monde, qui ont porté leur attention sur la planète. Une équipe de l’université de Yale (3) a même émis l’hypothèse, toujours en 2012, que, compte tenu de sa température et d’une forte présence de carbone, elle pourrait être composée de graphite et de diamants ! Hypothèse qui semble ne plus avoir la cote aujourd’hui… La nouvelle étude montre d'ailleurs que le rayon de la planète est plus petit qu'estimé précédemment, et concorde avec une composition de type terrestre, nettement moins exotique.

(1) Demory B-O., Gillon M., Madhusudhan, Queloz D., Variability in the super-Earth 55 Cnc e, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, may 2015 http://arxiv.org/abs/1505.00269

(2) Demory B.-O., Gillon M., Seager S., Benneke B., Deming D. & Jackson B., Detection of Thermal Emission from a Super-Earth, The Astrophysical Journal Letters, 2012.

(3) Madhusudhan N. et al. A possible Carbon-rich Interior in Super-Earth 55 Cancri e, The Astrophysical Journal Letters, 2012.

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