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Un trio de terres à 40 années-lumière ?
02/05/2016

À l’aide du télescope TRAPPIST, des astrophysiciens de l’Université de Liège ont découvert autour d’une "naine rouge ultrafroide", une étoile à peine plus grande que Jupiter, un nouveau système planétaire formé de trois planètes de la taille de la Terre. Ces planètes, bien que proches de leur hôte, ne sont pas soumises à des températures très élevées et pourraient abriter des zones propices à la vie sur une partie de leurs surfaces. Le nouveau système planétaire ne se trouve qu’à 40 années lumière de la Terre. Cette proximité devrait permettre à la future génération de grands télescopes d’étudier avec précision l'atmosphère des planètes. Il s’agit à ce jour des meilleures candidates pour la détection de l’eau liquide, voire de la vie, en-dehors du système solaire. Alors que la nouvelle vient d’être publiée dans la revue Nature, il y a fort à parier que les équipes d’astrophysiciens du monde entier se bousculeront pour étudier ce système planétaire extraordinaire. En attendant, l’équipe à l’origine de la surprenante découverte n’a plus d’yeux que pour la petite étoile.

La nouvelle est incroyable. Michaël Gillon et Emmanuël Jehin, chercheurs qualifiés FNRS au Laboratoire sur les Origines en Cosmologie et Astrophysique de l’Université de Liège, ne brident d’ailleurs ni leur joie ni leur engouement. Ils sont à la tête du projet TRAPPIST qui vient de découvrir un nouveau système comprenant trois planètes d’une taille similaire à celle de la Terre (1). Mieux, ces planètes pourraient tout à fait être habitables et sont à l’heure actuelle les candidates à la détection de vie extrasolaire les plus sérieuses que nous connaissons.

TRAPPIST exoterres

Cette découverte est une très bonne nouvelle pour les astronomes liégeois car elle est d’excellente augure pour leur nouveau projet SPECULOOS qui sera lancé officiellement en 2017. Financée majoritairement par l’Europe, cette expérience unique dirigée par Michaël Gillon suivra une intuition déjà prometteuse, et pourtant à contre-courant des croyances actuelles : les naines rouges ultrafroides, des étoiles bien plus petites, froides, et fréquentes que les analogues du Soleil, pourraient abriter des systèmes planétaires riches, complexes et nombreux. SPECULOOS consiste en quatre télescopes robotiques de 1 mètre de diamètre qui observeront  pendant plusieurs années environ 500 de ces petites étoiles froides situées dans le voisinage solaire, c’est-à-dire à moins de 100 années-lumière. En phase préliminaire de cette mission, l’équipe d’astronomes observe depuis 2011 une cinquantaine de cibles à l’aide de TRAPPIST, le télescope de l’ULg basé au Chili (lire l’article Des astrophysiciens liégeois au septième ciel). Cette préparation devait fournir une base statistique pour déterminer si cette idée avait des chances de succès. Après 5 ans, ce qui est très rapide en raison du petit nombre d’étoiles surveillées, trois planètes ont offert aux chercheurs leur transit autour d’une de ces étoiles, qui se trouve à seulement 40 années-lumière de la Terre dans la constellation du Verseau. Elle se nomme 2MASS J23062928-0502285. Suite à la découverte, elle est maintenant également connue sous le nom officiel de TRAPPIST-1.

Des systèmes planétaires encore inconnus

Il peut paraître étonnant que les systèmes planétaires des naines rouges ultrafroides n’aient pas été recherchés plus tôt, d'autant que ces étoiles sont très fréquentes dans la Galaxie, bien plus que les étoiles de type solaire. En effet la plupart des nouvelles étoiles qui se forment dans l'univers sont de petites tailles, bien plus petites que le Soleil. De plus, les étoiles ont une durée de vie qui est d'autant plus grande qu'elles sont petites et peu massives. Les étoiles produisent en effet elles-mêmes leur énergie, par fusion nucléaire en leur cœur. Les plus petites étoiles sont sujettes à des pressions et des températures internes bien plus faibles, et de ce fait, consomment leur carburant nucléaire beaucoup moins vite. À titre de comparaison, le soleil tiendra environ 10 milliards d’années alors qu’une naine rouge ultrafroide peut vivre plus de 100 fois plus. Autre intérêt de taille, ces étoiles sont moins lumineuses, et leur zone habitable est donc beaucoup plus proche de leur surface. Une planète pourrait orbiter autour en quelques jours à peine tout en offrant une température clémente. Or, une grande fréquence orbitale augmente drastiquement la chance de débusquer une planète puisqu’il y aura d’autant plus de transits. Et les transits de planètes orbitant autour de ces petits formats seront plus faciles à détecter, vu qu’une fraction plus importante du disque stellaire sera occultée lors du passage de la planète entre-elle et la Terre.

(1) M. Gillon, E. Jehin, et al. Temperate Earth-sized planets transiting a nearby ultracool dwarf star, Nature, May 2016

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