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Un nouveau protagoniste de la survie cellulaire
04/11/2014

Quel est le point commun entre des tumeurs solides, certaines surdités congénitales et la polyarthrite rhumatoïde ? La dérégulation de la fonction de la protéine KIAA1199 ! Dans une étude publiée dans Nature communications, des chercheurs de l’Université de Liège dévoilent le lien entre cette protéine et un récepteur appelé EGFR, acteur clé de la progression tumorale. Un lien qui pourrait avoir son importance dans les trois pathologies…

La cylindromatose familiale est une maladie génétique qui conduit à la formation de grosses tumeurs situées essentiellement au niveau de la tête. Ces tumeurs, qui lui valent également le nom de syndrome de tumeur en turban, sont bénignes. Elles résultent de l’hyperprolifération et de la survie prolongée des kératinocytes, des cellules constituant en grande partie la couche superficielle de la peau. « Une des raisons pour lesquelles ces personnes développent spontanément ces tumeurs est qu’elles présentent une surexpression de la protéine Bcl-3 au niveau de leurs kératinocytes », explique le Professeur Alain Chariot, chef de projet au sein de l’Unité de recherche Chimie médicale du GIGA de l’Université de Liège. 
En étudiant cette maladie, Alain Chariot et ses collègues étaient loin de se douter où leurs recherches allaient les mener…De manière générale, ils s’intéressent aux protéines requises pour permettre à une tumeur de se développer et de progresser jusqu’à former des métastases. « Nous procédons à la dissection moléculaire de tous les acteurs qui, d’une manière ou d’une autre, interviennent dans le développement et la progression du cancer », précise Alain Chariot. « Une fois que nous avons une idée précise de la façon dont ces protéines interviennent, nous inactivons les gènes correspondant chez des souris afin d’observer les conséquences au niveau de la progression tumorale ». Pour ce faire, les scientifiques combinent toute une série d’approches : microarray (puce à ADN), transgenèse, biologie moléculaire et cellulaire. Dans certains cas, l’inactivation d’un gène conduit à l’arrêt du développement de la tumeur et les chercheurs peuvent dès lors répertorier la protéine en question comme acteur essentiel dans le développement tumoral.

Histologie KIA1199 uterus

Une protéine qui active les voies de survie cellulaire

Dans le cadre de ses recherches sur la cylindromatose familiale, l’équipe d’Alain Chariot s’est penchée sur les conséquences, au niveau cellulaire, de la surexpression de la protéine Bcl-3. Que se passe-t-il au sein des cellules lorsque cette protéine est présente en grande quantité ? « Nous avons utilisé la technique de puce à ADN pour identifier tous les gènes qui sont induits suite  la surexpression de Bcl-3. Et nous avons constaté que le gène le plus induit par cette protéine dans des kératinocytes immortalisés est le gène qui code pour la protéine KIAA1199 ». Suite à ces observations, les chercheurs font le lien avec une autre pathologie impliquant une hyperprolifération des kératinocytes : le cancer du col de l’utérus. « Ce cancer résulte notamment de l’infection par un virus oncogénique, le HPV. Lorsque les patientes développent ce type de cancer suite à une infection par le HPV, elles présentent également de grandes quantités de cette même protéine Bcl-3. Ce qui engendre une surexpression de son gène cible et donc de la protéine KIAA1199 », poursuit Alain Chariot qui a travaillé sur cet aspect en étroite collaboration avec l’équipe du Professeur Philippe Delvenne du Laboratoire de Pathologie Expérimentale du GIGA de l’ULg. Mais quel est l’intérêt du virus HPV d’induire ce gène ? Quelle est la fonction de cette protéine ? Des questions auxquelles les chercheurs liégeois répondent dans un article publié dans Nature Communications (1). « Nous montrons que cette protéine est essentielle à la survie des kératinocytes. Si on prive ces cellules de la protéine KIAA1199, les kératinocytes meurent. La surexpression de ce gène est donc l’une des raisons pour lesquelles les patientes développent un cancer du col de l’utérus puisqu’il produit une protéine cruciale pour la survie des cellules cancéreuses », révèle Alain Chariot.

(1) Kateryna Shostak, Xin Zhang, Pascale Hubert, Serkan Ismail Göktuna, Zheshen Jiang, Iva Klevernic, Julien Hildebrand, Patrick Roncarati, Benoit Hennuy, Aurélie Ladang, Joan Somja, André Gothot, Pierre Close, Philippe Delvenne & Alain Chariot. NF-κB-induced KIAA1199 promotes survival through EGFR signalling. Nature communications| 5:5232 | DOI: 10.1038/ncomms6232 |          

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