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Le financement du service universel
19/06/2012

Privatisation, libéralisation, concurrence: ces mots sont régulièrement associés aux secteurs des télécommunications, de l’énergie et du transport.  Dans un environnement libéralisé, concurrence et service public entrent en conflit et la libéralisation nécessite une réflexion sur un nouveau mode de financement du service universel. 

Transport, service postal, télécommunication, énergie, distribution d’eau, on retrouve dans tous ces services une dimension de service public parallèle à des activités purement commerciales. Boite-postaleLa distribution journalière de courrier dans tout le pays, l’exploitation d’un réseau suffisamment dense et régulier de transports publics ou la possibilité pour tous les consommateurs d’être connecté à la téléphonie fixe et peut-être demain à l’internet haut débit font partie de ce que l’on appelle le service universel.  Il s’agit d’un ensemble de biens et services de qualité, accessible à tous les utilisateurs sans distinctions, notamment géographiques, pour un prix abordable et unique.  Ces services ne sont pas forcément rentables mais la société y attache une valeur, qu’elle soit écologique ou sociale, et les pouvoirs publics sont prêts à y consacrer une partie de leurs ressources.

Le marché postal

Dans un marché ouvert à la concurrence, le financement du service universel doit être repensé. Le marché postal, entièrement libéralisé depuis le premier janvier 2011, illustre parfaitement ce fait. Dans ce secteur, les obligations de service universel sont spécifiées dans les directives européennes encadrant la libéralisation du marché postal et font l’objet, en Belgique, d’un contrat de gestion signé entre l’opérateur historique, BPost, et l’Etat. Les obligations de service universel sont multidimensionnelles et ne s’appliquent qu’à un nombre limité de produits, dont le courrier adressé et les petits colis de moins de 2 kg.  Elles concernent l’ubiquité et la qualité du service postal, la structure tarifaire et le prix du service. Le prestataire du service universel est tenu d’assurer une distribution et une collecte quotidienne du courrier sur l’ensemble du territoire.  La qualité du service, notamment les délais d’acheminement et l’accessibilité des points de contact, est réglementée. Les produits composant le service universel doivent être offerts à un tarif abordable et, bien souvent, le régulateur impose un tarif uniforme, indépendant de la localisation du destinataire. Tous les pays européens appliquent de telles obligations avec, cependant, des nuances dans la définition des niveaux de qualité (certains pays imposent, par exemple, la distribution de courrier le samedi) ou en matière de réglementation tarifaire.

Si l’on impose ce type de contraintes, c’est qu’en l’absence de celles-ci, certains produits ou services ne seraient pas offerts. L’exemple classique est la distribution quotidienne de courrier dans les régions les moins densément peuplées où le coût est le plus élevé et excède le prix du timbre. Les obligations de service universel représentent donc un coût pour l’entreprise qui en a la charge. Avant la libéralisation, ce coût était financé par les profits réalisés dans les segments du marché les plus profitables, par exemple la distribution de courrier en zone urbaine, où l’opérateur historique était protégé de la concurrence. Le service universel était financé grâce à des transferts croisés au sein de l’entreprise : les profits réalisés dans les segments rentables compensaient les pertes réalisées dans les segments non rentables que l’entreprise est tenue d’assurer en vertu des obligations de service universel.

Ecrémage du marché

« Après l'ouverture du marché à la concurrence, les nouveaux entrants (pour autant qu'il y en ait) se concentrent sur les segments rentables, laissant les non-rentables à l'entreprise prestataire du service universel », explique Axel Gautier, chargé de cours en économie industrielle à HEC - Ecole de gestion de l'Université de Liège. « Ce phénomène que l'on appelle écrémage du marché, peut mettre à mal le financement du service universel. »

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