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La microassurance maladie en RDC
24/08/2016

A partir du moment où le système de santé s’auto-finance et est géré par la structure qui le finance, autrement dit l’assurance maladie, alors il devient possible de garantir l’efficacité et la qualité des soins. « On arrive alors à une structure qui, grâce aux cotisations, peut proposer des médicaments de qualité, non-expirés, ainsi qu’embaucher du personnel bien payé qui aura alors à cœur de faire correctement son travail. L’accès aux soins dans ces conditions est optimal. » Il ne s’agit pas là d’une question anecdotique (4) mais bien d’un enjeu crucial au sein d’une société hyper corrompue et dans laquelle les dysfonctionnements sont chroniques. Il n’y a donc rien de surprenant à ce que le lien de confiance entre le patient et le médecin soit loin d’être une réalité sur place. Il était de ce point de vue-là essentiel, pour que l’expérience menée par le Pr. Manzambi et ses équipes soit un succès, de construire et de gérer d’un bout à l’autre un centre médical associé à l’étude menée. C’est pourquoi le Centre Médical Mélissa a vu le jour. Ouvert vingt-quatre heures sur vingt-quatre, il dispensait les consultations et les interventions couvertes par la micro-assurance, à savoir les consultations de médecine préventive, de médecine générale ainsi que les consultations spécialisées (dermatologie, dentisterie, ophtalmologie), les accouchements, les actes de petite et moyenne chirurgie, les hospitalisations d’une semaine, les soins infirmiers. En outre, une pharmacie interne était en activité et délivrait la grande majorité des médicaments essentiels recommandés par l’Organisation mondiale de la santé et adoptés par la RDC. Côté personnel, les exigences étaient élevées : « Il suffisait qu’un patient de notre centre se plaigne, pour que l’employé perde son poste. Le message ainsi véhiculé était clair : la satisfaction du patient permet de garder son travail. Donc autant le faire bien ».

Des résultats concluants dans l’ensemble

Les résultats obtenus à la fin de l’étude ont été tout à fait positifs puisque le modèle Manzambi se trouve validé par les réponses des participants. En effet, 78.1% des micro-entrepreneurs ont amélioré leurs conditions de vie, 50% d’entre eux sont parvenus à constituer une épargne et 40.6% ont cotisé régulièrement à hauteur d’un dollar US à la micro-assurance. Parmi ces derniers, 72% ont amélioré leur accès aux soins. Par ailleurs, 69% des emprunteurs ont déclaré avoir augmenté leur pouvoir d’achat et la majorité d’entre eux (82%) ont réalisé du bénéfice. Le lien entre épargne et cotisation est également démontré puisque ceux qui ont épargné ont contribué 24.7 fois plus à l’assurance-maladie que les autres. Concernant l’accès aux soins de qualité, il est à relever que douze ménages soit 52% de l’échantillon ont eu recours systématiquement au Centre Melissa, et cela pour les raisons suivantes : le bon accueil réservé aux patients, un délai d’attente inférieur à une heure, un personnel à l’écoute, des médicaments prescrits disponibles à la pharmacie interne, un coût des soins abordable, la propreté des lieux et enfin une guérison rapide. 

Ces résultats tout à fait encourageants doivent cependant être nuancés par le fait qu’ils reposent sur un échantillon vraiment restreint et qu’ils ne démontrent pas que les cotisations à la micro-assurance santé ont été payées uniquement grâce à l’épargne constituée. 

De plus, l’expérience a tenu plus ou moins six ans selon le mécanisme préconisé par le modèle Manzambi avant de décliner car « l’approche scientifique n’a plus été la même et nous sommes tombés dans la routine avec des animateurs qui ne partageaient pas la même philosophie, la même ambition de sortir de la pauvreté ». La structure a même été délocalisée et installée en dehors de la zone de santé. Il a fallu alors trouver d’autres utilisateurs

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« Ceci n’est pas dans l’esprit des soins de santé primaires tel que décrit par l’OMS. Il faut normalement approcher l’utilisateur de la structure qu’on va exploiter. Il faut écourter les distances pour que les gens puissent accéder facilement à la structure. Dès lors que ce n’est plus le cas, ce n’est plus la même logique et on sort du système. » 

Cette issue démontre bien qu’au-delà du modèle, et ainsi que le souligne le Pr. Manzambi, ce sont les hommes et les femmes qui font la différence. Les mêmes causes produisent les mêmes effets, dit-on. 

(4) « Nous avons déjà vu des cas où une pharmacie d’un hôpital, ne fournissait aucun médicament pendant 6 mois alors qu’il y avait eu des malades. Des audits réalisés ont permis de constater que des médicaments circulaient dans un réseau parallèle. »

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