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Cartographier la criminalité des villes
09/10/2015

Quand les techniques de la police inspirent la géomatique

Donnees SOLAP

Le KDE permet donc de générer un espace continu en lissant des phénomènes discrets pour déterminer des valeurs relatives sur une carte. C’est cette méthodologie utilisée par la police que Jean-Paul Kasprzyk a intégrée dans le SOLAP multidimensionnel. Un croisement innovant. « Les SOLAP existants fonctionnent avec du vectoriel, ce qui ne permet de faire que des cartes discrètes, puisque c’est au programmateur de définir chaque entité séparément, ce qu’épargne le pixel comme unité spatiale. Raison pour laquelle les cartes générées en vectoriel ne considèrent pas l’espace de manière continue. » Maintenant, le SOLAP est une discipline récente, créée au Canada en 1997. A l’époque, les chercheurs ont pensé la structure des entrepôts de données spatiales de manière vectorielle, parce que la technologie est plus légère que le raster, et que les résultats étaient déjà probants. Or, pour préserver une convivialité et un intérêt à l’utilisation des SOLAP, la fluidité et donc la vitesse de calcul, qui dépend du nombre d’informations sur le serveur, reste une des principales priorités. Un net avantage qu’avait le vecteur sur le raster. « Seulement, on se rend compte aujourd’hui des limites du vectoriel pour tout ce qui concerne l’étude des phénomènes spatialement continus, comme la pollution ou le climat, ou, dans le cadre de cette recherche, la variation du taux de criminalité au sein d’une ville. De plus, l’espace continu modélisé par le raster offre plus de liberté à l’utilisateur lorsqu’il désire inclure des entités géographiques dans son analyse. En effet, ces entités ne doivent plus être définies à l’avance dans l’entrepôt de données puisqu’elles peuvent être reconstruites à la volée au moyen d’un ensemble des pixels stockés dans le système.»  

Un modèle interactif et multidimensionnel

L’interface se trouve en libre accès sur Internet (http://nolap01.ulg.ac.be/rastercube). Un accès qui nécessite toutefois une rapide inscription au préalable. L’utilisateur peut alors sélectionner une série de données (certains types de crimes, certains mois de l’année, etc) et demander ensuite de générer une carte qui les agrégera. Il pourra également consulter une série de graphiques délivrant des informations chiffrées, comme la variation de la criminalité au fil des mois, etc.

Outre la technologie raster, une grande originalité de la recherche est le caractère multidimensionnel de l’analyse continue. « Habituellement, explique Jean-Paul Kasprzyk, les bases de données structurent l’information sous forme de tables stockant des listes d’enregistrements. Ici, le caractère multidimensionnel résulte du fait que le SOLAP fonctionne avec des hypercubes de données. Il puise, dans l’entrepôt, des données qu’il agence ensuite en plusieurs dimensions, plusieurs axes d’analyse. Ensuite, on peut couper dans le cube, pour se limiter à un seul type de délit, par exemple. On peut aussi opérer des forages. Plutôt que d’agréger l’information en fonction du mois, on peut partir sur une moyenne trimestrielle, etc. On peut aussi jouer sur la résolution de la carte, sur le nombre de pixels. Chaque opération révélera des informations différentes, et dépendra donc de ce que l’utilisateur recherche. »

Multidimensionnel SOLAP

Aujourd’hui, le prototype n’est pas utilisé par la police fédérale. Mais il vient seulement d’être présenté, et son avenir n’est pas encore écrit. Et s’il ne trouve pas une application directe, il ouvre la voie à de nouvelles méthodes, à un tout nouvel état d’esprit dans l’approche de ces SIG, qui, discrètement, nous aident quotidiennement. De plus, outre la criminalité à Seattle et à Londres, il propose déjà d’autres jeux de données. Essentiellement pour démontrer son adaptabilité, il permet aussi de représenter les variations de la température à la surface de la Lune. Etant donné l’absence totale de délits sur ce satellite, l’opération suffit à prouver que le modèle ne se limite pas à combattre le crime !

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