Ce que nous apprend le temps des fleurs chez les jeunes filles…
Ce qu'il faut aussi retenir, poursuit Jean-Pierre Bourguignon, c'est que pendant la grossesse, une alimentation déséquilibrée parce que trop riche, ou bien une alimentation insuffisante, peuvent être des stresseurs, tout comme peuvent l'être l'exposition à des perturbateurs endocriniens. On sait, désormais, que les effets de ces deux facteurs s'avèrent cumulatifs. "Pendant la vie foetale, précise-t-il, nous programmons la manière dont va se régler notre balance énergétique. Or, les perturbateurs endocriniens modifient ce schéma de base de manière très convaincante : ils risquent, par exemple, de provoquer diabète de type 2 et obésité. Mais, aussi, d'influer sur la puberté. Ainsi, une de nos récentes études, menée sur des rates sous-nourries pendant leur gestation, démontre que cinq jours d'exposition à un perturbateur endocrinien (le DES) change le timing pubertaire, en association avec une modification des effets de la leptine sur l’hypothalamus". Les pistes de l'adoptionLe poids du facteur nutritionnel et la problématique des perturbateurs endocriniens semblent particulièrement cruciaux chez certaines fillettes : celles qui ont été adoptées dans des pays lointains (Lire Puberté précoce et DDT). En effet, en s'interrogeant sur le nombre de cas élevés de puberté précoce apparus chez ces fillettes, les chercheurs en sont venus à poser en hypothèse que leur avancement pubertaire pourrait résulter d'une combinaison d’une situation d'adversité en début de vie, suivie par une opulence (nutritionnelle) à la prépuberté et, dans certains cas, à l'impact d'une exposition (pour elles et/ou chez les mères enceintes) à des polluants chimiques, dont certains sont d'ailleurs désormais interdits en Europe... C'est le cas, par exemple, pour les enfants provenant de pays qui connaissent une situation de malaria endémique, et où le DDT est encore ou a encore été largement utilisé. Filles et garçons seraient alors davantage à risque de puberté précoce. Par rapport à des enfants belges non exposés, le risque serait 80 fois plus élevé, estiment les pédiatres endocrinologues. "Le moment fait le poison"Les constats quant aux conséquences des expositions in-utero à divers polluants et toxiques ont conduit les chercheurs à d'autres remises en question particulièrement importantes. "Pendant longtemps, détaille le Pr Bourguignon, nous avons examiné ces impacts environnementaux en nous plaçant sous l'angle de la toxicologie 'traditionnelle'. Nous adoptions le principe ancien de Parcelse selon lequel 'la dose fait le poison'. Or il découle de nos différentes recherches qu'un changement de paradigme s'impose absolument : c'est - aussi - le moment qui fait le poison. Ainsi, par exemple, le foetus va être très sensible à certains perturbateurs qui, à d'autres périodes de la vie, seraient sans effet sur l'organisme." Prévenez les citoyens !Potentiellement, les travaux menés sur la puberté sont donc susceptibles de déboucher sur des implications extrêmement lourdes au niveau de la santé publique. "Actuellement, le foetus est exposé à plus d'une centaine de substances chimiques, dont des perturbateurs endocriniens", rappelle le Pr Bourguignon. Quelle doit être l'attitude des autorités ? Pourront-elles résister aux pressions des lobbys qui luttent, au sein de l'Union européenne, afin de continuer à pouvoir employer ces substances ? Du côté des Etats, on sait que ces derniers sont souvent divisés quant aux mesures de précautions qu'ils décident. Par exemple, en France, le bisphénol A a été interdit dans tous les contenants alimentaires. En Belgique, les autorités se sont contentées de le bannir des aliments pour bébés. Page : précédente 1 2 3 4
|
|
|||||||||||||||||||||
© 2007 ULi�ge
|
||