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Des cathédrales forestières en sous-sol
10/07/2015

Dans les premières, les espèces endémiques abondent et la biodiversité est très spécifique et/ou très riche. Alors que les secondes, elles, se présentent généralement sous la forme de friches banales, n'abritant essentiellement que des espèces rudérales. Exemple type: les banlieues des mégalopoles africaines, totalement défrichées à des fins d'approvisionnement en bois. A première vue, on peut penser que ces zones se prêteront au reboisement envisagé par les agences ou les programmes onusiens, tels que le Programme des Nations-Unies pour l'Environnement (PNUE) ou le Mécanisme de Réduction des Emissions liées à la Déforestation et à la Dégradation des Forêts dans les Pays en développement (REDD+, Reducing Emissions from Deforestation and Forest Degradation).

cathedrales racines

Une photosynthèse spécifique

Un premier pas vient d'être accompli vers une meilleure connaissance des systèmes herbacés. Paru en décembre dernier dans la revue Frontiers in Ecology and Environment, un article (2) rédigé par les mêmes signataires que ceux de l'appel de "Science" tente de définir les traits communs à tous les systèmes herbacés tropicaux anciens, et cela quelle que soit la région du monde envisagée: Australie, Californie, Amérique du Sud, Afrique tropicale... "Les critères principaux mis en évidence à ce jour sont une richesse élevées en espèces herbacées, un taux d’endémisme élevé (c’est-à-dire qu’une grande proportion des espèces de ces milieux ne se retrouvent que là) et la présence d'une flore xylopode (qui se développe sur le bois) importante. On peut penser qu'il s'agit là d'une forme d'adaptation aux conditions environnementales extrêmes, soit des sécheresses et des incendies répétés. Mais ce n'est qu'un début: d'autres études intégrées sont nécessaires si l'on veut arriver à des outils de gestion et, éventuellement, de restauration vraiment efficaces et spécifiques à ces milieux". Rien qu'à l'Unité Biodiversité et Paysage de Gembloux Agro-Bio Tech, quatre à cinq personnes à temps plein travaillent en ce moment sur ce type de caractérisation, tant sur les végétations liées au cuivre que sur les forêts claires.

Grégory Mahy insiste: ce type d'appel à ne pas aller trop vite en besogne dans les programmes de reforestation ne constitue en rien une remise en cause de la pertinence de programmes comme REDD+. "Les forêts, leur protection, leur restauration, constituent sans le moindre doute de puissants outils de piégeage du carbone. Nous attirons simplement l'attention sur le "comment?" et le "où?" procéder. Il est indispensable de disposer d'une cartographie à l'échelle de sous-régions qui soit beaucoup plus fine que la carte actuellement mise sur la table des agences onusiennes. Il serait regrettable que ces dernières succombent à la tentation de donner des gages aux bailleurs de fonds ou d'assurer une visibilité trop hâtive aux projets de reforestation envisagés, et de ce fait se contentent d'appliquer mécaniquement les recettes qui ont fait leurs preuves ailleurs dans le passé. Si on n'y prête pas attention, on ira droit vers un choc entre deux impératifs tout aussi essentiels: la conservation de la biodiversité - on craint, d'ici à la fin du siècle, la disparition de 40% des espèces animales et végétales - et la lutte contre le dérèglement climatique. Personne n'y gagnerait".

(2) Toward and old-growth concept for grasslands, savannas, and woodlands, Frontiers in Ecology and Environment, 2015

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