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Retraite professionnelle et maladie d'Alzheimer 
14/04/2015

Pour mener à bien leurs travaux, les chercheurs s'appuyèrent sur la base de données de l'étude ICTUS/DSA (Impact of Cholinergic Treatment Use/Data Sharing Alzheimer), dont l'objectif était d'examiner l'histoire naturelle de la maladie d'Alzheimer, l'effet des traitements symptomatiques au moyen d'inhibiteurs et l'impact socioéconomique de l'affection. Conduite entre 2003 et 2005 dans 12 pays européens (France, Suisse, Italie, Espagne, Grèce, Allemagne, Belgique, Roumanie, Grande-Bretagne, Pays-Bas, Suède et Danemark), l'étude ICTUS avait recruté 1 379 patients avec diagnostic probable d'Alzheimer, dont 64,7% de femmes.

Sur la base de critères d'exclusion précis (ne jamais avoir travaillé, avoir quitté son emploi avant l'âge de 50 ans, être toujours en activité au niveau professionnel, avoir été diagnostiqué Alzheimer avant d’être parti à la retraite), les auteurs de l'article de PLoS One sélectionnèrent, dans la base de données ICTUS, 815 personnes à un stade de la maladie léger à modéré. Initialement, ils procédèrent à une mesure similaire à celle effectuée par Lupton, en distinguant cependant deux éléments : l'âge du diagnostic et celui de l'apparition des symptômes. Résultats : dans le premier cas, chaque année supplémentaire de travail retardait l'âge d'entrée dans la maladie d'Alzheimer de 0,31 an ; dans le second, de 0,30. En d'autres termes, la tendance décrite par Lupton était non seulement confirmée mais, qui plus est, amplifiée.

ICTUS Alz SBiais de selection
À présent, l'heure était venue de contrôler les biais qui avaient été reprochés à l'étude britannique. Primo, le biais de sélection. Pour ce faire, Catherine Grotz et ses collaborateurs restreignirent l'échantillon de départ à 637 sujets retraités à, ou avant, l'âge de 65 ans et n'ayant pas développé la maladie d'Alzheimer avant cet âge. Dans ces conditions, l'effet enregistré précédemment restait significatif, mais était réduit de moitié : chaque année supplémentaire de travail ne différait plus l'âge d'entrée dans la maladie que de 0,15 an quel que soit le critère retenu - âge du diagnostic ou âge des premiers symptômes.

Encore fallait-il agir ensuite sur le biais de causalité inverse, c'est-à-dire s'assurer, autant que possible, que les sujets ne se trouvaient pas en phase prodromique de la maladie et n'étaient donc pas partis à la retraite en raison de difficultés cognitives. Comment procéder ? En ne conservant dans l'étude que les personnes retraitées à, ou avant, 65 ans et ayant développé une démence au moins 10 ans après. « Il demeurait alors 447 personnes dans l'échantillon, précise Catherine Grotz. Il apparut, au sein de ce groupe, qu'une année supplémentaire d'activité professionnelle retardait en moyenne de 0,06 an l'âge d'entrée dans la maladie d'Alzheimer. Ce chiffre n'était plus statistiquement significatif ; il tenait juste de la tendance. »

Ce résultat incite également à la prudence quant aux conclusions que l'on pourrait tirer sur les liens existant entre ces deux paramètres que sont l'âge de la retraite et l'âge d'entrée dans la maladie d'Alzheimer. « Seules des études longitudinales prospectives permettraient de les préciser vraiment », insiste la psychologue de l'ULg.

(4) Bonsang E, Adam S, Perelman S (2012). Does retirement affect cognitive functioning? J Health Econ 31: 490-501.

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