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Le droit de la nationalité en Belgique
09/02/2015

Au-delà de cette nouvelle exigence, la réforme de 2012 se distingue par sa recherche d’équilibre et de cohérence, fruit d’un compromis politique dans lequel « chacun a mis de l’eau dans son vin ». Nous ne nous intéresserons ici qu’aux dispositions illustrant le mieux ce caractère équilibré. D’emblée, Patrick Wautelet nuance : « L’équilibre n’est pas encore là, mais l’intention y est. On poursuivra certainement par d’autres réformes ». En attendant, la loi de 2012 a une histoire. Elle s’inscrit dans une série de réformes antérieures du Code de la nationalité belge. Or, « toutes ces réformes allaient dans le même sens, celui d’un assouplissement de la possibilité de devenir belge. On avait notamment supprimé toute obligation de paiement lors de l’introduction d’un dossier, et toute obligation de démontrer l’intégration ». L’objectif de la réforme de 2012 vise à remettre les pendules à l’heure en quelque sorte, et à établir un compromis entre l’accès à la nationalité belge et l’introduction de conditions à respecter pour l’obtenir. En somme, la Belgique par la réforme de 2012, vient s’aligner sur la norme ayant cours dans la plupart des Etats européens : sous l'angle de la durée de résidence sur le territoire (5 à 10 ans), sous l'angle des conditions puisqu’il faut désormais tester l’intégration, et enfin en ce qui concerne la procédure puisque l’acquisition par déclaration est devenue le droit commun et la naturalisation, l’exception.

Démontrer son intégration en Belgique, une procédure lourde mais originale

Cependant, il serait injuste de réduire la teneur de cette réforme à un simple alignement sur les standards européens. En effet, la Belgique se montre tout à fait originale dans sa façon de tester l’intégration. « C’est la mode en Europe depuis une dizaine d’années de faire passer un test d’intégration. » Ceux-ci prennent des formes différentes selon le pays, mais ont toujours la particularité de n’être que le reflet d’un moment T, celui du test. « En France, il s’agit d’une conversation avec un fonctionnaire. Aux Pays-Bas et en Angleterre, ce sont des tests sur ordinateur durant lesquels on voit des petites séquences filmées, un peu comme au permis de conduire, sur base desquelles on doit répondre à des questions. Le tout dure une vingtaine de minutes.» Il ne faudrait pas en conclure pour autant que cette façon de procéder facilite l’acquisition de la nationalité. Au contraire, « beaucoup d’études montrent que cela a un effet de frein sur l’acquisition. Les tests ont beau être bien conçus, avec un esprit d’ouverture, il n’en reste pas moins que cela peut s’avérer discriminant lorsqu’on n’a pas l’habitude de l’outil informatique, lorsqu’on a quitté l’école à l’âge de 11 ans ou encore lorsqu’on n’a pas l’habitude des tests ». Face à cette tendance, la Belgique a fait un choix radicalement différent, celui d’évaluer l’intégration sur base d’un « portfolio » portant sur les 5 ou 10 années antérieures à l’introduction de la demande. Ce portfolio doit refléter plusieurs niveaux d’intégration qui ne doivent pas forcément être cumulés : l’intégration linguistique, l’intégration économique soit l’exercice d’une activité professionnelle, et l’intégration sociale (suivre des cours par exemple). « Il me semble que grâce à ce système, nous prenons une image beaucoup plus exacte de l’intégration. Cela dit l’avenir dira si c’est la meilleure manière de procéder car il est vrai que cette méthode est plus chronophage et plus lourde à porter pour les administrations qui voient leurs responsabilités augmenter avec la réforme. » En effet, alors qu’avant la réforme les autorités communales n’étaient que de simples organes de transmission des dossiers, elles sont devenues par la voie du nouveau texte les premiers contrôleurs des demandes d’acquisition par déclaration. A elles la charge désormais de se prononcer sur l’exhaustivité du dossier. Voire même sur sa recevabilité si l’on s’en tient à la rédaction incertaine du Code dans son article 15, §2, al.4 qui évoque l’hypothèse selon laquelle la demande est « complète et recevable ».

Or, justement, sur base de quels critères la demande peut-elle être jugée recevable ? A première vue, les conditions exigées par le législateur apparaissent tellement procédurières que la nature équilibrée de ces dispositions semble quelque peu affaiblie. En effet, l’étranger qui désire devenir belge se trouve vite pris dans un « carcan » sur le plan de la forme et du fond puisque la procédure à respecter est lourde et les impératifs de contenu nécessitent dans un certain nombre de cas de rentrer dans des comptes d’apothicaire. passeport BelgiqueSi l’on excepte l’étranger né en Belgique et qui y a toujours vécu, deux catégories principales de personnes se dégagent : l’une regroupe celles qui résident depuis 5 ans en Belgique et l’autre celles qui y résident depuis 10 ans. La première catégorie se divise en plusieurs sous-catégories. Nous n’évoquerons ici que les étrangers qui séjournent en Belgique depuis 5 ans et qui ne disposent d’aucun lien familial avec un ou une belge et ceux qui séjournent en Belgique depuis 10 ans.

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