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Les dents étaient presque parfaites...
30/01/2015

Un changement de philosophie

L'article du Dr Vanheusden relate un cas clinique (case report) : celui de la restauration complète de la bouche d'un homme de 36 ans. Il était touché par une usure sévère généralisée (photos). En plus de l'aspect disgracieux qu'elle donnait à son sourire, le patient souffrait de sensibilités dentaires : elles augmentaient lorsqu'il mangeait ou buvait des produits froids.  

Le patient ne fumait pas, et il ne prenait pas de médicament qui aurait pu expliquer l'usure de ses dents. En revanche, son anamnèse (les questions posées par le praticien) a révélé qu'il était un grand consommateur d'une fameuse boisson gazeuse au goût sucré, dont il se "régalait" à raison de plus d'un litre par jour. Aux lésions érosives ainsi créées, il ajoutait des lésions d'abrasion dues à l'emploi d'une brosse à dents dure, et une technique de brossage inadéquate. Pour compléter le tableau, cet homme avait aussi la mauvaise habitude de serrer les dents en cas de stress ou de tension...   

Le plan de traitement du Pr Vanheusden  a visé à restaurer l'anatomie, la fonction et l'esthétique des dents usées. Il fallait, également, protéger ces dernières contre de futures usures tissulaires. Ce vaste programme n'était pas l'unique objectif fixé par le praticien : "L'évolution récente de la dentisterie nous conduit à privilégier, autant que faire se peut, une approche conservatrice. Cela signifie qu'elle limite au strict maximum toute réduction supplémentaire des tissus encoreprésents", explique le praticien.

sourire usure dentaire
A ce stade, pour bien saisir en quoi cette approche est encore en partie novatrice, un petit retour dans l'histoire (récente) de la dentisterie s'impose. Ce détour historique concerne les thérapies "classiques" proposées aux patients souffrant de ce type de problème. "Face à des situations d'usure, certains praticiens essaient de temporiser", remarque le praticien. Par exemple, ils proposent dans un premier temps de compenser l'usure en plaçant un composite (sorte de pansement) posé sur la dent, afin de la reconstituer fictivement.

"En réalité, cette solution s'apparente à celle d'une emplâtre sur une jambe de bois, tranche le Pr Vanheusden. Le composite est loin d'être dans un matériau assez solide pour résister aux problèmes. Certes, il permet de répondre aux sensibilités ressenties par le patient. Mais c'est bien son seul apport. De plus, le composite posé est assez volumineux, et il est souvent associé à des reprises de caries (sous le pansement). Bien entendu, cela dégrade la dent davantage encore."

L'autre option d'une dentisterie plus "traditionnelle" consiste à attendre, sans rien faire... Une fois l'usure bien avancée, le dentiste propose de placer des couronnes sur les dents concernées. Sorte de coques (généralement en céramique) qui les coifferont entièrement, ces prothèses seront évidemment conçues pour compenser l'usure en redonnant une nouvelle anatomie extérieure aux dents.

Cela dit, pour poser les couronnes, il faut tailler dans les tissus de la dent . "Il s'agit donc forcément d'une approche qui exige une réduction tissulaire supplémentaire de la dent. Souvent, une dévitalisation de racine est également nécessaire, avec la pose d'une vis dans la racine, ce qui la fragilise, et implique un risque de fracture à venir", précise le Dr Vanheusden. Pendant longtemps, il n'y a pourtant pas eu d'autres choix  : pour reconstituer fictivement les dents, et leur faire "reprendre de la hauteur", seules des couronnes étaient possibles. Mais les temps ont changé, grâce  à l'apparition et à l'essor d'une technique, celle du collage au tissus dentaires.

Un avenir qui colle

Désormais, les techniques de collage dentaire, en développement depuis les années 1990, permettent d'adopter une autre approche, considérée, elle, comme minimalement invasive. "En s'appuyant sur les techniques de collages, nous parvenons à reconstituer les dents, à restaurer leur anatomie, et ce pratiquement sans réduire davantage les tissus de la dent, ou bien le moins possible. Notre objectif consiste à poser des actes soustractifs les plus légers possibles, de conserver les dents - déjà usées et fragilisées -, sans les agresser davantage", explique le Pr Vanheusden.  En dentisterie, cette approche minimalement invasive est une véritable révolution. Au bénéficie du patient, bien sûr.

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