Le site de vulgarisation scientifique de l’Université de Liège. ULg, Université de Liège

Un nouvel outil pour débusquer la conscience
10/12/2014

Avant les travaux du doctorant de l'ULg, un des écueils auxquels se heurtaient les SSVEP-BCIs était qu'ils dépendaient du contrôle du regard, donc des nerfs périphériques et des muscles. Or, nous l'avons évoqué, certains patients cérébrolésés ne possèdent plus ce contrôle moteur. Ces systèmes, où l'individu doit orienter les yeux dans la direction du ou d'un des stimuli cibles présentés dans son champ visuel, relèvent de ce que les spécialistes appellent l'attention « overt ». Leur applicabilité à des patients dont le contrôle visuel est altéré ou inexistant est problématique. Aussi Damien Lesenfants a-t-il choisi de concevoir un système basé sur le concept alternatif d'attention « covert », indépendant du contrôle moteur, où le sujet se concentre mentalement sur le stimulus cible sans devoir bouger les yeux.

Système hybride SSVEP/Entropie

Dans le système conçu au sein du Coma Science Group, un panneau est placé à 30 cm de la tête du sujet. Il se présente sous la forme d'un damier de 7x7 cm composé de diodes électroluminescentes carrées de 1x1 cm, les unes jaunes, les autres rouges. Les deux types de stimuli (diodes jaunes, diodes rouges) se trouvent ainsi en permanence dans le champ visuel du sujet. Toutefois, selon leur couleur, les diodes émettent des flashes lumineux à des fréquences différentes : 10 hertz (10 fois par seconde) pour les rouges, 14 hertz pour les jaunes. « Le sujet est équipé de 12 électrodes placées à l'arrière du crâne au niveau des aires visuelles du cortex occipital, indique Damien Lesenfants. S'il se concentre sur une couleur, l'activité des neurones de ces aires se synchronisera avec la fréquence de clignotement des carrés correspondants. »

Dispositif BCIs

Les performances de cette « covert SSVEP-BCI » furent d'abord testées sur des sujets sains. Comme avec d'autres systèmes de ce type, elles furent de l'ordre de 70%, ce qui est insuffisant pour permettre d'envisager d'appliquer la technique dans le contexte de lésions cérébrales graves - locked-in syndrome, troubles de la conscience. Au cours de l'étape suivante de ses recherches, Damien Lesenfants s'est efforcé d'optimiser le système en agissant sur plusieurs paramètres (le temps de concentration, l'algorithme d'extraction des caractéristiques, le nombre d'harmoniques...). Par ailleurs fut élaboré un nouvel algorithme de sélection automatique du sous-ensemble d'électrodes censé être le plus pertinent pour chaque sujet testé, eu égard aux caractéristiques de son cerveau.

« Grâce à l'optimisation de ces différents paramètres, notre covert SSVEP-BCI a atteint un niveau de performances de 85% chez les sujets sains, ce qui nous permettait de le tester chez des patients en locked-in syndrome, rapporte le doctorant de l'ULg. Chez ces patients cérébrolésés, les performances sont plus faibles que chez les sujets sains. Aussi, en partant de performances de 60 ou 70% chez ces derniers, n'aurions-nous pu obtenir que des résultats équivalents au hasard statistique chez les patients LIS. »

Dans le locked-in syndrome, l'évaluation de l'interface s'opéra à deux niveaux : d'une part, la capacité du système à détecter la réponse à la commande et, d'autre part, son aptitude à servir de moyen de communication entre le patient et le monde extérieur. Les performances obtenues furent relativement décevantes. La covert SSVEP-BCI ne dévoila une réponse à la commande que chez deux patients sur six alors que tous étaient conscients, par définition, et une communication ne put être établie qu'avec un patient sur quatre.

Page : précédente 1 2 3 4 suivante

 


© 2007 ULi�ge