La « radicalité ouvrière », au-delà de la dépolitisation
Le deuxième niveau retenu se concentre sur l'examen d’une séquence historique montrant qu'en période de tension sociale et politique intense, le recours à la qualification radicale est déterminé par un enjeu stratégique de taille. La chose s'avère patente sous la plume de Martin Jander (Hamburger Institut für Sozialforschung) qui revient sur les années de plomb allemandes dans un texte intitulé « Communiste, social révolutionnaire, antisémite ? D'un usage détourné de la radicalité ouvrière par les mouvements terroristes d'extrême gauche allemands ». Elle l'est aussi chez Andrea Cavazzini (Groupe de Recherches Matérialistes) qui, dans « Luttes ouvrières et années de plomb en Italie : de la centralité ouvrière à l'occultation du conflit », entend faire ressortir le processus de diabolisation de la lutte sociale de l'époque. Dans « Italy and Greece, before an after the crisis : between mobilization and resistance against precarity », Alice Mattoni et Markos Vogiatzoglou (European University Institute) s'attellent, quant à eux, à déconstruire l’évidence d’une radicalisation de la lutte ouvrière comme conséquence des mesures d'austérité prises par les gouvernements européens. Il faut nuancer fortement, estiment-ils. Non seulement parce que la précarisation de l'emploi et la dégradation des conditions de travail étaient déjà bien présentes avant la crise survenue en 2008. Mais surtout parce que l’analyse des modes de lutte de ces dernières années montre que les actions menées par les ouvriers d'Italie et de Grèce ont un objectif inédit et irréductible à une réaction épidermique dont la seule origine serait une dégradation de la stabilité matérielle : elles proposent de nouvelles formes d'existence professionnelle. La violence contre soi : suicide et invisibilité socialeÀ ce troisième temps de la critique des formes et des usages de la radicalité ouvrière en Europe succède un ultime quatrième. Grégory Cormann (Chef de travaux au département de philosophie de l’Université de Liège), dans son article intitulé « La radicalité politique au bout du travail : du suicide des ouvriers aux suicides en série des employés », part d’un cas de « radicalisation » tout à fait particulier : le suicide récent d'un ouvrier belge d'Arcelor Mittal, Alain Vigneron, que Grégory Cormann soumet à une lecture politique à rebours des traitements pathologisants et infra-politiques. Page : précédente 1 2 3 suivante
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