Le Brésil veut développer un marché mondial de l’éthanol
Un autre meneur des pays émergents, le Brésil s’est lui aussi rapproché de l’Afrique ces dernières années. Dans sa nouvelle publication, l’auteur explique que cette évolution doit beaucoup au volontarisme politique de Lula Da Silva au cours de ses deux mandats présidentiels (2003-2010). D’importantes délégations d’hommes d’affaires brésiliens accompagnent alors les nombreuses tournées présidentielles sur le continent africain. Ce volontarisme politique débouche sur une augmentation exponentielle des relations commerciales avec l’Afrique, qui passent de 3,5 milliards d’euros en 2003 à 21 milliards en 2012.
« Le Brésil cherche des débouchés en Afrique pour ses produits manufacturés, mais l’un de ses objectifs est aussi de développer le marché de l’éthanol, un biocarburant qu’il fabrique à partir de la canne à sucre, explique Sebastian Santander. Le Brésil a un grand savoir-faire dans ce domaine, il aimerait créer un marché de l’éthanol au niveau mondial et sait qu’il ne peut y arriver seul. Les entreprises et autorités brésiliennes promeuvent donc l’expansion de l’industrie de la canne à sucre dans plusieurs pays africains tout en leur fournissant l’expertise technique dans la production d’éthanol. Elles espèrent qu’une augmentation du nombre de pays producteurs d’éthanol de canne rendra son offre plus stable, ce qui satisfera le consommateur et contribuera au développement d’un marché mondial où le Brésil serait en position de force ».
Sebastian Santander explique qu’à la différence de la Chine, le Brésil bénéficie d’un a priori favorable sur le continent africain. « Les pays africains ont une vision positive du Brésil. Les Brésiliens ont surfé sur cette vague, ils ont aussi étudié ce qui a été fait dans le passé par les Européens et les Chinois afin de ne pas reproduire les schémas qui ont eu des conséquences négatives pour l’image de ces pays en Afrique. Par exemple, au lieu d’envoyer d’importantes sommes d’argent ou de se limiter à l’exploitation des matières premières, le Brésil a décidé de se concentrer sur la transmission de connaissances, notamment par l’installation en Afrique d’entreprises publiques dans le domaine agricole. Ces entreprises forment du personnel local. En retour de cette transmission de connaissances, le Brésil bénéficie de marchés. On commence toutefois à entendre des critiques à l’égard du Brésil, notamment au Mozambique, qui a octroyé aux entreprises brésiliennes le droit d’exploiter l’équivalent de deux tiers de la superficie du Portugal pour développer le marché de l’éthanol. Cela peut poser des problèmes environnementaux liés à un déboisement de ces terres ».
![Canne a sucre. Canne a sucre]()
L’Inde et la Turquie étendent leurs réseaux africains
A l’instar de la Chine et du Brésil, l’Inde et la Turquie sont deux puissances émergentes qui jouent la carte de l’absence de passé colonial pour se rapprocher du continent noir. Une diaspora de plus de deux millions de personnes d’origine indienne est présente en Afrique. Olivier Dupont et Chacko Philip, les auteurs du chapitre de l’ouvrage consacré à l’influence indienne en Afrique, écrivent qu’avec une telle diaspora, « les autorités indiennes disposent d’importants réseaux à partir desquels elles peuvent développer des stratégies en vue de promouvoir l’implantation des compagnies commerciales et favoriser les investissements indiens ». Une prise de conscience de ce potentiel a contribué à décupler les échanges commerciaux entre l’Inde et l’Afrique au cours de la décennie 2000-2010. La tenue de sommets Inde-Afrique a aussi joué un rôle en ce sens.
Au niveau turc, c’est l’arrivée au pouvoir de l’AKP qui a coïncidé avec une politique étrangère proactive de la Turquie, notamment en Afrique. Le développement de rapports diplomatiques (la Turquie a triplé le nombre de ses ambassades en Afrique) et l’essor de la coopération au développement turque en Afrique ont contribué à l’accroissement des échanges commerciaux entre la Turquie et l’Afrique, qui sont passés de 3 à 14 milliards d’euros au cours des dix dernières années.