Ces poissons qui ont découvert l’électricité
Pour vérifier que le muscle protracteur était également à l’origine des décharges électriques, et surtout pour en comprendre le processus, il a fallu observer l’ultrastructure d’échantillons au microscope électronique. « Il faut savoir qu’un muscle classique est composé de cellules dont la majorité de l’espace est occupé par les myofibrilles, à l’origine des contractions. Plus il y a des myofibrilles, plus grande sera la force du muscle. Nous avons observé que chez les poissons qui produisaient uniquement du son, les myofibrilles occupaient moins de place que pour un muscle classique, mais colonisaient encore la cellule dans une grande proportion. » En revanche, le poisson incapable de produire du son, mais bien de l’électricité, avait très peu de myofibrilles. Plusieurs évolutions au sein d’un même genreL’étude est en ceci unique qu’elle montre qu’un même muscle pourvu de différentes ultrastructures a pu acquérir différentes propriétés. « Chez d’autres poissons, développe Eric Parmentier, comme les anguilles ou les poissons-éléphants, on savait depuis longtemps que les électrocytes étaient myogéniques (d’origine musculaire, Ndlr). Par contre, ces espèces n’ont jamais révélé une série évolutive similaire à celle des Synodontis, puisqu’elles sont toutes exclusivement électriques. Il n’y a plus de stades intermédiaires qui coexistent dans leurs groupes. » Ces nouvelles connaissances complètent une autre recherche, consacrée aux piranhas, cette fois (2) Une étude sur des spécimens de différents âges qui a permis d’établir que les muscles capables de faire du son étaient dérivés des muscles du dos. Chez les plus jeunes, les cellules de ces muscles soniques comportent un gros noyau et peu de myofibrilles, qui se développent avec l’âge. A un moment de la croissance des muscles, le développement des myofibrilles est bloqué et ils se spécialisent dans l’émission de sons. « Cette observation ne concerne que les piranhas, concède le chercheur. Mais on peut imaginer étendre cette propriété à d’autres espèces, et émettre l’hypothèse que lors de la croissance, en bloquant la formation des myofibrilles, les Synodontis développent un muscle sonique. En la bloquant davantage, ils créent un muscle capable de stocker l’électricité. » Ce n’est qu’une hypothèse, puisque de telles observations n’ont pas été menées sur les poissons-chats. Cependant, elle reste une piste d’explication plausible. ![]() (2) Millot S, Parmentier E (2014) Development of the ultrastructure of sonic muscles: a kind of neoteny? BMC Evolutionary Biology 14: 24 Page : précédente 1 2 3 suivante
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