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La vie en bleu
02/07/2014

La lumière bleue accentue les réponses des régions cérébrales mises en œuvre dans les émotions et dans la cognition. Des chercheurs de l'Université de Liège et de l'INSERM ont réussi à démontrer l'implication directe d'un type particulier de cellules de la rétine, les cellules ganglionnaires exprimant la mélanopsine, dans l'impact qu'a la lumière sur l'activité cérébrale sous-tendant la cognition. Ces travaux plaident en faveur de la conception de systèmes lumineux où le bleu serait mis à l'honneur. Une façon, semble-t-il, de favoriser les performances cognitives et de combattre les troubles de l'humeur.Publication dans la revue PNAS.

Lumière bleueOn connaît depuis longtemps les deux types de photorécepteurs rétiniens impliqués dans la vision : les cônes et les bâtonnets. Ils sont connectés à des neurones baptisés cellules ganglionnaires, qui en recueillent l'information et la transmettent au niveau cérébral. Il y a un peu plus de dix ans, les travaux d'Ignacio Provencio, du département de biologie de l'Université de Virginie, ont révélé l'existence d'un type de cellules ganglionnaires intrinsèquement photosensibles : les cellules ganglionnaires exprimant la mélanopsine, un photopigment inconnu jusque-là. Particulièrement sensibles à la lumière bleue dans les longueurs d'onde voisines de 480 nanomètres, ces cellules ganglionnaires d'un « nouveau type » ne constituent que 3 à 5% de l'ensemble des cellules ganglionnaires rétiniennes, lesquelles sont au nombre d'un million environ. Elles sont dédiées à la régulation des effets non visuels de la lumière. Ainsi, elles servent notamment de base à une transmission directe de l'information lumineuse vers le noyau suprachiasmatique, notre « horloge biologique ».

Au sein de l'équipe de Pierre Maquet, du Centre de Recherches du Cyclotron (CRC) de l'Université de Liège (ULg), Gilles Vandewalle, chercheur qualifié FNRS, s'intéresse précisément à l'impact non visuel de la lumière sur l'activité cérébrale et, plus particulièrement, sur la régulation de l'éveil, du sommeil, de la cognition ou encore des émotions. Il s'efforce donc d'élucider les mécanismes sous-jacents en s'appuyant principalement sur l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf).

Les émotions préfèrent le bleu

En octobre 2010, la revue Proceedings of the National Academy of Science of the USA (PNAS) publia les résultats d'une étude(1) consacrée à l'effet immédiat de la lumière, et de sa couleur, sur le traitement cérébral des émotions (lire aussi Le bleu contre le blues saisonnier). Réalisés par des chercheurs du CRC de l'Université de Liège, du Surrey Sleep Research Centre (Université du Surrey), ainsi que du Genova Center for Neuroscience et du Swiss Center for Affective Sciences (Université de Genève), ces travaux montrèrent que la couleur de la lumière ambiante influence la manière dont le cerveau traite les stimulations émotionnelles. La couleur bleue, celle à laquelle les cellules ganglionnaires à la mélanopsine sont les plus sensibles, augmente les réponses à ces stimuli.

Il ne faut pas être grand clerc pour constater que la plupart des personnes se sentent de meilleure humeur en été, mieux dans leur peau, plus enjouées, de sorte que l'on établit intuitivement un lien entre la luminosité et l'humeur. Plus éloquent encore : un certain nombre d'entre nous souffrent d'un syndrome dépressif récurrent qui prend corps habituellement vers octobre et s'efface avec l'arrivée des beaux jours : le trouble affectif saisonnier (TAS). Sa « version édulcorée », le blues de l'hiver, qui se traduit par de la fatigue, un manque de moral, un sommeil contrarié, de l'irritabilité, etc., touche environ 15% des individus au sein de nos populations. Tout indique donc que la lumière joue sur l'humeur. Et la luminothérapie nous conforte dans cette idée, puisqu'il a été démontré que l'exposition de la rétine à une lumière blanche de haute intensité est bénéfique pour lutter contre le TAS et le blues de l'hiver. Plus récemment, divers travaux ont cependant souligné la supériorité de la lumière bleue pour ce type de prise en charge.

(1) Vandewalle G, Schwartz S, Grandjean D, Wuillaume C, Balteau E, Degueldre  C, Schabus M, Phillips C, Luxen A, Dijk DJ, Maquet P (2010), Spectral quality of light modulates emotional brain responses in humans, Proceedings of the National Academy of Science of the USA 107(45):19549-54

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