« L’Afrique belge », terre d’explorations historiques
Dans son tour d’horizon très détaillé, Patricia Van Schuylenbergh n’oublie pas non plus d’évoquer le « déclassement progressif de l’histoire coloniale », en Belgique comme ailleurs, par la mise en cause de l’Imperial history au profit de l’African history. « En effet, écrit-elle, le paysage mental de l’anticolonialisme et l’apparition des nationalismes africains modifient les habitudes historiques ». Ces perspectives donnent lieu notamment à une extension des champs et lieux de recherche au Zaïre même. Dans les années 1970, la formation d’historiens s’y généralise dans le cadre de l’Université nationale qui rassemble les trois anciens départements d’histoire qui existaient à Kinshasa, Kisangani et Lubumbashi, la capitale katangaise. L’histoire du Congo est renforcée par des « nationaux », formés en Belgique et en France. ... à la « gêne » des BelgesP. Van Schuylenbergh explore ensuite les multiples courants historiographiques qui, en Belgique comme à l’étranger, ont donné un nouvel élan à la recherche historique au cours des quinze dernières années. En révélant au grand jour les faces les plus sombres de l’EIC et de la colonie belge, de nombreux auteurs, historiens ou non, indique-t-elle, ont renouvelé la lecture du passé colonial. En outre, la médiatisation de certains ouvrages – l’exemple le plus explosif étant Un holocauste oublié(1), du journaliste américain Adam Hochschild – et certaines productions audiovisuelles – comme le film de l’Anglais Peter Bate, White King, Red Rubber, Black Death(2), vont propulser le fait colonial au-devant de la scène publique. Et... déclencher une virulente « guerre des mémoires », en particulier autour de l’exploitation outrancière du caoutchouc congolais, point focal de l’histoire de l’EIC. Droit au souvenir contre devoir de mémoire ?Face au « devoir de mémoire », le « droit au souvenir » n’a pas dit son dernier mot... P. Van Schuylenbergh analyse également la riposte organisée depuis une dizaine d’années par les associations d’anciens coloniaux, telles que « Mémoires du Congo » et « Afrikagetuigenissen » qui se considèrent comme les dépositaires de l’héritage colonial belge. Selon l’historienne, ils « défendent avec véhémence, et même parfois de manière dogmatique, la mémoire fondatrice de leur identité particulière ». Même si le sentimentalisme les inspire souvent, ces associations n’hésitent pas à monter, parfois violemment, au créneau lorsque le souverain de l’Etat indépendant et l’œuvre coloniale belge sont attaqués. Pour étayer leurs affirmations, elles utilisent les outils médiatiques de leurs détracteurs : ouvrages, articles de presse, films, sites web et réédition de documents et travaux historiques considérés comme les références du genre. (1) Hochschild Adam, Les fantômes du Roi Léopold. Un holocauste oublié, Belfond, 1999. |
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