Mais le plus intéressant restait à venir… Nicolas Vandewalle a en effet ensuite utilisé des chaînes de plus en plus grandes. Il est de plus en plus facile de créer des anneaux puisque les chaînes étant ainsi de plus en plus flexibles, se replient de plus en plus facilement sur elles-mêmes. A partir de là, il est possible de former une « goutte », figure encore plus intéressante car on a créé une espèce de jonction (photo b). Si on brise la goutte au niveau de la jonction triple, il reste une singularité (photo c) qui présente un angle interne d’environ 80°. Et cette singularité est permanente, le système revient toujours à cette configuration ! « C’était très perturbant, explique Nicolas Vandewalle. J’ai étudié comment les petits dipôles s’orientent. Ils sont bien tous alignés selon la chaîne, mais il y a un souci sur la bille qui se trouve au centre. En magnétisme, on appelle cela une frustration. En quelque sorte, cette bille n’arrive pas à se décider. Elle ne sait pas très bien comment elle est orientée, vers où elle doit s’aligner. »
Monopôle magnétique
De tels défauts ont été étudiés voici longtemps déjà, notamment par P.W. Anderson (Prix Nobel de physique en 1977) dans les années 1950. Il avait prédit que dans certains matériaux, ces frustrations pourraient jouer un rôle important. Mais ce n’est que récemment, en 2008 et 2009, qu’on a étudié de tels matériaux appelés « glace de spin » (ou spin ice) car ils ont la même structure cristallographique que la glace, mais sont formés d’un empilement de petits aimants (à l’échelle atomique, ceux-ci sont appelés des spins, d’où le nom). D’où la question que se pose Nicolas Vandewalle : «N’y aurait-il pas un lien entre les billes aimantées et ces matériaux microscopiques difficiles à étudier et qu’on essaie d’observer à très basse température, donc avec des équipements que peu d’équipes peuvent se payer ? » Or, qu’ont découvert ceux qui étudient ce type de matériaux ? Qu’ils se comportent comme un monopôle magnétique !