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L'écho de la conscience
13/01/2014

Le seuil fatidique

Cette méthode qui s'appuie sur la perturbation induite à un système, le cerveau, pour calculer, grâce à des algorithmes sophistiqués, sa capacité à intégrer l'information a été élaborée par Marcello Massimini, professeur à l'Université de Milan et professeur invité à l'Université de Liège. En l'appliquant à des sujets plongés dans un sommeil profond, le chercheur italien avait montré que cet état induisait une perte de connectivité cérébrale. Mais que se passait-il chez des personnes anesthésiées, des personnes en train de rêver (sommeil paradoxal) ou chez des patients sévèrement cérébrolésés présentant l'un de ces différents diagnostics que sont le coma, l'état végétatif/syndrome d'éveil non répondant, l'état de conscience minimale ou le locked-in syndrome ? C'est la question que souleva l'équipe de Steven Laureys. Elle fut au centre d'une étude expérimentale entreprise à Liège, au cours de laquelle 200 mesures furent effectuées chez 50 sujets, les uns éveillés, d'autres endormis ou anesthésiés, d'autres encore gravement cérébrolésés.

 

« À la base, le principe est que plus le cerveau génère de l'information comme un tout intégré, moins il est possible de compresser sa réponse quand il est soumis à une forte stimulation. Nous évaluons la complexité de cette réponse en fonction de l'écho électrique généré », indique Olivia Gosseries, chargée de recherches du FNRS au sein du Coma Science Group et premier auteur, avec Adenauer Casali (Milan), de l'article publié récemment dans Science Translational Medicine.

Le groupe international a mis en évidence que la mesure de complexité calculée à partir des réponses corticales à la stimulation magnétique transcrânienne déterminait de manière fiable le niveau de conscience des sujets soumis au test. Cette mesure, qu'ils ont baptisée Pertubational Complexity Index (PCI), oscille entre deux pôles: 0 et 0,7. Il est clairement apparu qu'il existait une frontière (0,3) délimitant la présence ou l'absence de conscience. Tant chez les personnes endormies ou anesthésiées que chez les patients en coma ou en état végétatif/non répondant, le PCI se situe sous le seuil fatidique (0,3). En revanche, ce dernier est franchi chez les patients en état de conscience minimale, chez les patients en locked-in syndrome ainsi que chez les sujets contrôles éveillés, et le chiffre obtenu semble proportionnel au niveau de conscience. Chez les patients LIS, par exemple, il est normal (entre 0,5 et 0,7), tandis qu'il varie entre 0,3 et 0,5 dans l'état de conscience minimale. « Nous n'avons observé aucune erreur, aucune exception à la règle », précise Steven Laureys. De sorte que l'on peut considérer que les chercheurs ont réussi à construire, pour la première fois, une échelle de mesure objective le long du spectre conscience-inconscience.

Traquer la conscience

Évidemment, dans le but de valider la technique, les patients cérébrolésés sélectionnés pour cette première étude étaient des personnes chez qui un diagnostic avec un très haut degré de certitude avait pu être préalablement posé. Les cas ambigus, où l'on ne peut déterminer si le patient est en état végétatif/non répondant ou en état de conscience minimale, avaient été écartés. Aujourd'hui, c'est vers eux que vont se tourner les chercheurs. Car, d'un point de vue clinique, ils sont au centre des débats, c'est pour eux qu'un outil de mesure comme le PCI pourrait jouer un rôle déterminant en permettant de préciser de façon presque incontestable s'ils disposent ou non d'une conscience résiduelle.

TMS

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