Dans un an et demi, les radio-amateurs devraient disposer pour leurs communications et connexions en mode numérique d’un « CubeSat » liégeois. Ce relais expérimental autour de la Terre a reçu le nom d’OUFTI-1. Un terme populaire du wallon liégeois qui exprime une exclamation, mêlée d’étonnement, mais est aussi l’acronyme de Orbital Utility for Telecommunication Innovations. Outil pédagogique de l’enseignement supérieur, le nano-satellite est le résultat de travaux d’étudiants, ingénieurs et chercheurs à l’Université de Liège et dans des Hautes Ecoles liégeoises.
OUFTI-1 vient de voir le jour en ambiance ultra-propre près des simulateurs Focal du Centre Spatial de Liège (CSL). Il s’agit d’un cube couvert de panneaux solaires, qui tient dans la main (volume d’1 l), pèse à peine plus qu’une boîte de sucre en morceaux (masse d’1 kg), et consomme autant d’électricité qu’une horloge électrique (puissance d’1 W). On doit son délicat accouchement - l’assemblage et l’intégration de ses composants miniaturisés - aux mains expertes et bons soins de cinq « sages femmes » : les professeurs Gaëtan Kerschen (LTAS/Université de Liège) et Jacques Verly (Institut Montefiore/Université de Liège), les ingénieurs Valery Broun (Maître assistant à l’ISIL), Nicolas Crosset et Xavier Werner (Intelsig/Institut Montefiore). Avec une télé-surveillance, depuis Singapour, d’Amandine Denis (Département d’aérospatial et mécanique/ULg) et de Jonathan Pisane, qui ont joué un rôle primordial dans la mise en œuvre du premier nano-satellite belge.
La Wallonie à la mode « Cubesat »
Sur l’ensemble du globe, depuis une dizaine d’années, on assiste à l’éclosion d’une communauté éducative autour de teams étudiants qui s’investissent dans le développement de systèmes spatiaux micro-miniaturisés. Il s’agit d’aborder au moindre coût le monde de l’espace - un environnement hostile à l’accès difficile - dans le cadre de travaux de groupe et de fin d’études. Le standard « Cubesat » répond à cette attente pédagogique. Il se réfère à un concept qui est né dans les années 1990 à l’initiative du professeur Bob Twiggs au Calpoly (California Polytechnic State University) de San Luis Obispo et à l’Université de Stanford. Ayant fait ses preuves comme instrument éducatif, ce concept s’est répandu à travers le monde.
On décline « CubeSat » en plusieurs variantes modulaires pour des missions « à bas coût » de science et de technologie. Son phénomène, désormais planétaire, compte déjà plus de 200 nano-satellites mis en orbite. Il a permis à des pays d’effectuer leurs débuts dans l’espace : c’est le cas, en Europe, du Danemark, de la Norvège, la Suisse, l’Estonie, la Pologne, la Hongrie, la Roumanie, l’Autriche, et, en Amérique latine, de l’Equateur. OUFTI-1 constituera une « première » spatiale pour la Belgique, grâce à Liège et à la Wallonie ! Le « CubeSat » liégeois est bien là, prêt à l’emploi. Son premier examen par les spécialistes de l’European Space Agency (ESA) est réussi. Ce qui est de bon augure pour envisager son lancement en 2015.
A l’issue d’un appel à candidats, auquel a répondu l’Université de Liège, l’ESA a en juillet dernier jugé intéressant d’inscrire OUFTI-1 parmi les missions Cubesat qu’elle envisage de lancer dans le cadre de son programme d’éducation FYS (Fly Your Satellite!). Il fallait dans de brefs délais rédiger un cahier des charges, produire une documentation volumineuse (dont une procédure d’intégration) et un manuel d’emploi et réaliser le modèle de vol, ceci de façon identique à ce qui se fait pour tout « grand » satellite. Un OUFTI-1 complètement assemblé a été présenté, le 6 novembre dernier, aux examinateurs de l’ESA dans le cadre du Test Readiness Review (TRR), étape cruciale en vue des campagnes d’essais en ambiance spatiale. Il s’agissait de voir si le « CubeSat » liégeois répondait aux exigences strictes de l’ESA et du programme FYS pour ses qualités et performances. Ils ont fait des recommandations pour garantir la fiabilité du nano-satellite. Après une série de tests fonctionnels, un autre examen ESA doit vérifier son aptitude à passer les essais sous vide dans les installations de l’European Space research & Technology Centre (ESTEC), à Noordwijk (Pays-Bas).