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Jeux vidéo : stop ou encore ?
21/11/2013

Dans l'opinion publique comme dans les médias, la cause est entendue : les jeux vidéo - et surtout les jeux vidéo violents- rendent les jeunes agressifs. Dans un mémoire et dans un article scientifique qui en est découlé, des chercheurs bousculent pourtant ces "certitudes"...

Tout le monde n'a pas la chance de pouvoir participer à une étude pour laquelle il est demandé, principalement, de jouer à un jeu vidéo. C'est, pourtant, ce qui est arrivé à 43 jeunes garçons. Pour son mémoire en psychologie (1), Roxane Toniutti a placé ces jeunes issus d'écoles primaires de la Province de Liège derrière un écran et les a laissés manier les commandes durant 15 minutes. Certains d'entre eux ont ainsi pu s'adonner à un jeu de combat, tandis que les autres devaient guider un match de foot. Mais tous ignoraient qu'en s'amusant (tranquillement?), ils contribuaient à éclairer un débat qui divise les psychologues, les médias et l'opinion publiques : les jeux vidéo violents rendent-ils les jeunes agressifs? Ou encore : ces jeux sont-ils potentiellement dangereux pour les adolescents ou les pré-adolescents et, en particulier, pour ceux d'entre eux qui proviennent d'une population à risque ?

"Depuis 1999 et le massacre de Colombine, effectué par deux adolescents amateurs de jeux vidéo violents, il est fréquent de trouver dans les médias des discours sans nuance, qui font un lien entre des actes agressifs et la consommation de ce type de jeux. Je trouvais anormal que le débat soit si tranché, que les faits soient présentés de manière si avérée et qu'ils ne prennent souvent en considération qu'une seule variable, celle du jeu. J'ai donc voulu voir ce que la littérature en disait et mener une étude apportant des éléments de réponses par rapport à des points peu ou moins investigués", détaille Roxanne Toniutti.

Riche en surprises, son mémoire, mené sous la direction de Cécile Mathys , docteur en psychologie et assistante au Département de Psychologies et Cliniques des systèmes humains de l’Université de Liège et de Michel Born, Professeur émérite au Département Psychologie de la délinquance et du développement psychologique, vient de faire l'objet d'un article scientifique (2) publié dans la Revue de Psychoéducation (Université de Montréal). Il apporte du grain à moudre à ceux qui pensent que l'on peut cesser d'accuser les jeux vidéo d'être, à eux seuls, à la source de tous les maux. Il ouvre, aussi, la porte à la réflexion pour tous ceux qui estiment qu'il faudrait s'intéresser davantage à une politique de prévention face à ces médias. Et, donc, élaborer des stratégies à la fois à destination des jeunes joueurs... et de leurs parents.

L'école de la violence ?

"Dans la littérature, le débat concernant l'impact du contenu violent des jeux vidéo sur les comportements agressifs se partage entre deux grandes écoles", explique la psychologue. Aux yeux de certains spécialistes, ces jeux ont des effets délétères en augmentant les comportements agressifs. La présence de sang, d'armes à feu, la taille de l'écran, le mode de perception, le fait de gagner ou de perdre mais, aussi, l'âge du joueur (l'adolescence) et son état émotionnel, influenceraient ce paramètre. Selon d'autres spécialistes, c'est exactement le contraire : aucun effet négatif ne découlerait de ces pratiques. Les chercheurs suggèrent même parfois que ces jeux présentent des effets bénéfiques sur le comportements (grâce à un effet cathartique sur les pulsions agressives, exprimées ici dans un monde virtuel) et sur les habilités cognitives.Jeux vidéos ados4

Par ailleurs, "des études ont choisi de se pencher sur les processus mentaux qui aboutissent à l'acte agressif, constate Roxane Toniutti. Elles se sont appuyées sur deux grands modèles (le Modèle Affectif d'Agression Général et le Processus de l'Information Sociale). Ils prennent en considération les variables cognitives du joueur, ses schémas, sa personnalité, ses affects, qui peuvent être influencés par ses interactions sociales, ses expériences, son éducation."

(1) Effet à court terme des jeux vidéo violents sur le biais d’attribution hostile chez des préadolescents, 2011, ULg.
(2)Toniutti, R., Born, M., & Mathys, C. (2013). Les jeux vidéo violents augmentent-ils le biais d’attribution hostile chez des préadolescents? Revue de Psychoéducation, 42(2), 357-376.

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