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Une épaule sur laquelle s'appuyer
29/10/2013

Enfin, améliorer

installation coiffeTous ces résultats sont essentiels pour la mise en place de la stratégie préventive prônée par la chercheuse. « Idéalement, en début de saison, il faudrait évaluer les sportifs de haut niveau et établir s'ils présentent une faiblesse au niveau des rotateurs », assure Bénédicte Forthomme.  Dans ce cas, mais aussi de manière générale, un programme d'entraînement spécifique et un suivi devraient être instaurés, afin d'améliorer la force freinatrice des muscles clés.  Ainsi, on pourrait probablement éviter un certain nombre de lésions. Un tel programme de correction contrôlé devrait s'adresser au sportif confirmé et pourrait concerner le jeune passionné désireux de continuer à progresser dans le sport qu'il a choisi."

A la lumière de cette étude, faire passer un bilan isocinétique à un joueur avant sa saison sportive prend donc tout son sens. La scientifique souligne cependant qu'une évaluation par des tests morphokinétiques, capables de détecter raideurs et dysfonctionnements, gardent également leur place et ne peuvent être négligés.
Notons que ce type de démarche concerne déjà, au membre inférieur, les joueurs de football professionnels.

Demain, c'est aujourd'hui 

"L'Association francophone de tennis a été sensible à notre approche et, avec notre collaboration, elle fait déjà passer des examens isocinétiques en pré-saison à ses meilleurs joueurs.  Ce concept concerne également les sportifs sous contrat à la Fédération Wallonie-Bruxelles, qui a désigné le Professeur Jean-Louis Croisier (ULg et CHU de Liège) comme expert en isocinétisme pour ses sportifs de haut niveau.  En fait, il faut éveiller les consciences et les pratiques au souci d'éviter les premières blessures, et renforcer le suivi chez les sportifs qui ont déjà subi de premières lésions."

Outre les résultats de son étude, elle dispose d'un autre argument pour faire avancer sa cause : comme le montre l'article sur "L'approche préventive de la lésion d'épaule chez le sportif" (1), les outils de rééducation existent et ils s'améliorent - ou vont s'améliorer encore puisque l'épaule fait l'objet de davantage d'attentions et d'études. Ainsi, en se fondant sur une démarche d'évidence scientifique, l'intérêt majeur des étirements a été confirmé.  Certaines adaptations spécifiques de l'épaule à la gestuelle sportive, potentiellement délétères, pourraient aussi être prises en compte, y compris lors de l'approche collective d'entraînement, afin d'optimaliser la stabilité et la mobilité de l'articulation.

"Nous sentons une volonté des clubs et des fédérations à aller dans le sens d'une plus grande attention à la prévention et d'une préparation physique adaptée, y compris en collaboration avec des kinésithérapeutes. Le désir d'avancer est présent", assure Bénédicte Forthomme.

Balle de match

Certes, l'équipe du Pr Forthomme a pu progresser dans l'éclaircissement du poids des causes intrinsèques sur les lésions dans le volleyball. Mais cela n'exclut nullement, dit-elle, de mener d'autres études complémentaires (ce qu'elle fait d'ailleurs...) ou de rester attentif aux causes extrinsèques comme la charge de l'entraînement, la fatigue, le matériel, la technique, ... En effet, bien des domaines sont encore à investiguer pour mieux comprendre les raisons qui mènent à la blessure d'un sportif et les moyens de la contrer.  Ainsi, "tout un pan de la recherche devra aussi se consacrer aux critères nécessaires afin de déterminer le moment où le joueur peut remonter sur le terrain après une blessure. Les résultats de notre l'étude peuvent en effet mener à se poser des questions sur la prise en charge des blessures précédentes. Un traitement insuffisant de la première lésion favorise-t-il de nouvelles lésions ou le risque d'une lésion ultérieure ? ", interroge la chercheuse.

En attendant d'autres avancées, Bénédicte Forthomme défend son double message : celui de l'importance de l'attention à porter à la performance et, tout à la fois, au risque de lésion. "La prise en charge du sportif doit être articulée sur ces deux axes, soutient-elle. On ne peut oublier la prévention lésionnelle, et cela ne concerne pas que les joueurs de haut niveau. Cette étude montre qu'il faut empêcher le sportif de se blesser. L'entraînement doit donc veiller au maximum à juguler les facteurs de risque de lésion." On sait, désormais, pour quelles raisons les sportifs risquent de blesser leur épaule, les outils d'évaluation existent, les techniques d'entraînement ou de rééducation adaptées et individualisées.  Mentionnons, parmi les projets innovants, le LAMH (Laboratoire d’Analyse du Mouvement Humain) qui unit les Facultés de Médecine et des Sciences Appliquées, notamment pour l’analyse biomécanique du geste sportif.  Dans de telles conditions, il n'y a plus aucune raison pour ne pas tout mettre en œuvre afin que les matchs soient beaux.  Et moins dangereux pour les sportifs.

(1) Shoulder pain among high-level volleyball players and preseason features, B. Forthomme, V.Wieczorek, A.Frisch, J-M. Crielaard, J-L. Croisier, 45(10),1852-1860,2013 in Medicine & Science in Sports & Exercise, et L'Approche préventive de la lésion d'épaule chez le sportif, B. Forthomme, S. Geizes-Cervera (Fédération Française de Handball), F.Delvaux, J-F.Kaux,  J-M. Crielaard, C. Schwartz , J-L.Croisier (Université et CHU de Liège, Département des Sciences de la motricité, Service de Médecine Physique et Kinésithérapie-Réadaptation).

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