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Dilemmes et indécision des stratèges de la Grande Guerre
04/10/2013

L’adoption d’une position proche d’Anvers s’avère un choix prudent. Il est défendu par le chef d’état-major général, Antoine de Selliers de Moranville. Celui-ci propose un système de défense relativement classique, avec un positionnement attentiste au centre du pays. A son avis, l’armée doit attendre que l’adversaire viole une frontière et éventuellement ensuite se porter à sa rencontre sans jamais trop s’éloigner d’Anvers. Cette position centrale doit permettre d’éviter aux troupes d’être encerclées par l’ennemi et coupées de leur base.

A l’opposé, le sous-chef d’état-major, le Baron Louis de Ryckel, prône une conception novatrice de la défense du territoire belge. Contrairement aux idées en vigueur jusqu’alors, il envisage une défense beaucoup plus offensive vers la frontière menacée. Il refuse l’abandon d’une partie du territoire à l’ennemi au profit de sa défense dans son intégralité. Le retrait vers Anvers doit être décidé uniquement en dernier recours. Pour de Ryckel, il est possible de connaître à l’avance d’où viendra le danger, notamment grâce aux avertissements du personnel diplomatique en poste en Allemagne et en France. L’armée doit se porter vers la frontière menacée afin d’éviter qu’une bonne partie du pays ne soit envahie. Sans s’être jamais entretenu avec de Ryckel, le capitaine Emile Galet, conseiller militaire du Roi, arrive aux mêmes conclusions. Il est lui aussi favorable à une défense plus rapprochée de la frontière. Les mémoires de ces deux stratèges révèlent qu’ils pensaient depuis longtemps que le danger viendrait de l’Allemagne plutôt que de la France. Raison pour laquelle ils voulaient concentrer les troupes près de la Meuse, à Liège et Namur.

L’ultimatum de l’Allemagne, le 2 août 1914, est presque vécu comme un soulagement. Il permet de se prononcer de manière catégorique sur la frontière à défendre, et donc sur le lieu de concentration de l’armée. Au vu des dissensions qui parcourent les rangs de ses officiers, le roi Albert I joue le rôle d’arbitre. Conformément à la tradition, peu de sources rendent compte de l’avis du souverain. Comparant les mémoires du Baron de Ryckel et de Selliers de Moranville, Christophe Bechet met en évidence certaines contradictions : « Les deux stratèges semblent chacun d’avis que le Roi est favorable à ses convictions. Mon opinion est que le Roi en tant que souverain, tente de ne pas froisser les susceptibilités de chacun ».  

Concentration août14

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