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La Belgique à l’heure de la fiscalité internationale
27/08/2013

Une question de fait

Autant dire qu’aucun des auteurs ne mentionne le « cas » Depardieu ! Même si celui-ci pourrait finalement parfaitement illustrer le premier chapitre de l’ouvrage, dédié à une notion de base en matière de fiscalité internationale : la résidence. « Ce critère est le facteur de rattachement que l’on retient habituellement, détaille le professeur. On associe les gens à un territoire et donc à un système fiscal en fonction de la résidence fiscale, qui est une résidence de fait, distincte de la résidence civile concrétisée par l’inscription au registre de la population ». Il faut donc pouvoir prouver, en fait, aux autorités fiscales, la réalité de la résidence en un endroit donné ; cela pourra se faire notamment grâce à des factures d’eau, d’électricité, des souches de restaurants, des tickets de caisse… « Tout est une question de fait, résume-t-elle. Si l’on reprend l’exemple de certains acteurs ou hommes d’affaires, la question est de savoir si la France va accepter qu’ils ne soient plus résidents français. Pour cela, ils vont devoir prouver la réalité d’une résidence fiscale dans un autre pays, et l’absence de facteurs de rattachement subsistant en France. Cela ne veut pas dire qu’ils ne pourront plus se rendre en France, mais ils ne pourront plus y avoir leur domicile habituel. Quant à les considérer comme résidents belges, il leur faudra démontrer une certaine présence (2). Pour des personnes qui voyagent beaucoup, la détermination du lieu de la résidence fiscale peut se révéler délicate »

Les mouvements transfrontaliers donnent inévitablement lieu à des situations de double imposition. Celle-ci survient lorsque deux pouvoirs fiscaux veulent taxer la même personne ou le même objet. Elle peut être d’ordre économique ou juridique. Et Isabelle Richelle de citer deux exemples concrets. « Imaginons le cas d’un commerçant ayant un point de vente à Liège. Ses affaires fonctionnent bien, il souhaite ouvrir un second point de vente à Maastricht. Puisqu’il est résident belge, la Belgique peut taxer son revenu mondial, comprenant le revenu réalisé aux Pays-Bas. Mais les Pays-Bas vont aussi vouloir taxer ce revenu généré sur leur territoire. Il s’agit dès lors d’une double imposition internationale  juridique, puisque le même contribuable sera soumis deux fois à l’impôt. »

En ce qui concerne la double imposition économique, on pense naturellement à la société qui distribue un dividende à un actionnaire. « Ce dividende fait partie du bénéfice réalisé par l’entreprise, il est donc soumis à l’impôt des sociétés. Pour l’actionnaire, il s’agit d’un revenu, qui est en principe taxable. » D’où la double imposition. Dans ce cas-ci économique, puisqu’elle concerne deux contribuables distincts. On imagine aisément ce qu’il resterait du dividende en question si celui-ci devait être distribué d’actionnaires en actionnaires sans mécanisme correcteur de la double imposition…

« Pas mal, pour un petit pays »

Ce type de situation peut se présenter tant dans un contexte national qu’international. Si la société et l’actionnaire sont tous deux d’un même pays, l’État pourra accepter de supprimer une des deux taxations, ce qui sera favorable à son économie. Mais cette société et cet actionnaire peuvent aussi être établis sur des territoires différents. C’est là que le bât blesse : quel pays acceptera d’abandonner sa part du gâteau ? « On peut aussi envisager de partager ce gâteau entre les deux, mais c’est beaucoup plus difficile à mettre en œuvre, note l’auteur. Donc, la plupart du temps, l’un ou l’autre devra renoncer. »

En pratique, actuellement, les Etats se mettent d’accord pour se répartir le pouvoir d’imposition, en concluant des conventions internationales préventive de la double imposition. Un État peut aussi adopter des mesures unilatérales, ce qui cependant peut le déforcer dans ses négociations avec ses partenaires. En Belgique, près de 80 conventions sont signées et en vigueur (de la France aux États-Unis en passant par l’Inde ou les Philippines), tandis qu’environ 35 autres sont signées mais pas encore en vigueur, ou toujours en cours de négociation. « Pas mal, pour un petit pays ! ».

(2) Bien qu’il soit douteux que les autorités fiscales belges contestent la réalité de la résidence de personnes souhaitant se faire taxer en Belgique…

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