Le nageur hors du temps
…Et la stase morphologique peu ordinaire« Ces stases sont rares, poursuit Valentin Fischer. Elles s’expliquent souvent par le fait qu’un animal va trouver une zone refuge, qui va très peu se modifier durant les temps géologiques. Une barrière de corail, par exemple, ou une mer peu profonde, qui n’est pas affectée par les grands changements océaniques. Une zone stable, sans nouvelles conditions majeures qui vont venir contraindre l’évolution d’une espèce. » Mais dans le cas de Malawania, il est difficile d’établir une hypothèse qui expliquerait cette stase aussi longue. Malawania est une espèce océanique, les ichtyosaures qui lui sont contemporains évoluent tous énormément. « Et en même temps, c’est le seul représentant connu de l’espèce. Et il n’est pas parfaitement conservé. Du coup, on ne peut encore dégager aucune grande ligne sur ses habitudes, ou sur son biotope. Malawania a été retrouvé au Moyen-Orient, on ne sait pas si ça veut dire que sa lignée s’y était cantonnée ou non, même si c’est peu probable sur une période aussi longue, de plusieurs dizaines de millions d’années. » Mais d’un point de vue général, si l’enregistrement fossile des ichtyosaures n’est pas si mauvais pour les latitudes nord et sud de notre planète, très peu de spécimens ont été trouvés dans les zones tropicales de l’époque (Moyen-Orient, Afrique…). Il y a donc un travail d’exploration important à y mener, que la découverte de Malawania pourrait initier. Et de nouvelles découvertes dans ces régions pourraient permettre de mieux comprendre l’évolution de ce tout nouveau groupe que représente ce nageur hors du temps. « Une chose est certaine, c’est que la découverte d’une telle lignée implique qu’il y a énormément de données que nous ne connaissons pas encore. On doit trouver bon nombre de représentants de sous-groupes et d’époques différents, de chaînons manquants, pour combler cette nouvelle chaîne. » Un faux départ
Un expert Anglais, Robert Appleby, décide d’étudier le spécimen. Etant donné sa morphologie et l’endroit où il a été retrouvé, pas de doute que l’animal ait évolué au Jurassique. Appleby décide de rédiger un papier pour noter cette découverte, qui ne semble alors pas d’un grand intérêt. Pourtant, son papier n’est pas retenu, faute de précision dans les méthodes de datation de la roche. La morphologie de l’animal et la situation du fossile ne suffisent pas. Il a très bien pu être déplacé depuis un autre site. Dans les années 1970, un expert de Cambridge prélève un échantillon, et après avoir dissous la roche dans de l’acide, en étudie les microfossiles et les pollens restant. Le diagnostique est sans appel. Ce fossile date du Crétacé. Mais Appleby croit alors qu’un mauvais échantillon a été livré. Il réécrit un article, en considérant toujours l’ichtyosaure comme jurassique. Le papier est à nouveau refusé. Le chercheur lâche son os à la fin des années 1970. |
|
|||||||||||||||||||||
© 2007 ULi�ge
|
||