L’utilisation des pesticides, à cause de leurs effets préjudiciables sur l’environnement et la santé, reste aujourd’hui largement controversée. Serait-il temps d’envisager d’autres méthodes et produits de protection des plantes contre les maladies et animaux qui nuisent aux plantes ?
Depuis que l’homme a commencé à cultiver des plantes, il s’est trouvé confronté à des maladies, à des plantes concurrentes aux cultures et à des animaux qui abimaient ses cultures ou qui leur transmettaient des maladies. Face à cette situation, il a fallu qu’il utilise des produits pour protéger les cultures contre ces problèmes. Il a d’abord utilisé des produits comme des cendres, certaines huiles végétales et des plantes aromatiques avant de recourir aux produits beaucoup plus forts, élaborés dans les usines chimiques. Si leur efficacité n'est pas discutée, leur utilisation pose néanmoins de nombreux problèmes.
L’évolution de l’utilisation des pesticides de synthèse.
Les cultures subissent des attaques des germes de maladies et des animaux qui en réduisent la récolte. Chez certaines plantes, comme par exemple la pomme de terre, le blé, la tomate, les pertes de la récolte peuvent atteindre 100% lorsque l’agriculteur n’a pas protégé ses cultures.
Les produits traditionnels de protection des cultures n’ont pas toujours permis de réduire les pertes causées par des maladies qui continuaient à augmenter, surtout lorsqu’on a commencé à pratiquer l’agriculture sur de plus grandes surfaces dans le but d’augmenter la récolte.
Il a fallu dès lors recourir à des produits de protection des cultures beaucoup plus efficaces.
Vers les années 1930, à partir des gaz de combat largement utilisés lors de la première guerre mondiale, on a développé des produits chimiques qui ont été très efficaces contre les insectes. D’autres produits chimiques ont ensuite été élaborés pour combattre les maladies des plantes. Ces produits ont été utilisés en grandes quantités et dans des usages multiples : contre des moustiques qui transmettent la malaria, contre les insectes nuisibles aux plantes, dans les travaux d’entretien des routes,…
Au cours des 30 dernières années, les pesticides ont connu une très forte utilisation, de sorte qu’ils sont devenus indispensables en agriculture dans plusieurs pays du monde: de 1945 à 1985, l’utilisation des pesticides a doublé tous les dix ans.
Les conséquences liées à l’utilisation des pesticides.
Ces produits de protection des cultures contre les maladies et animaux qui les abiment se sont avérés efficaces, en rendant disponibles les ressources alimentaires à une population sans cesse croissante. Néanmoins, les effets n’ont pas toujours été ceux attendus.
En effet, les pesticides chimiques montrent aussi des effets non souhaités : ils posent un véritable problème de santé pour les utilisateurs et pour la population, ils présentent un impact négatif sur l’environnement (la pollution de l’air, la pollution de l’eau douce et de mer, la contamination des sols,…). Ils sont aussi liés à la diminution des insectes utiles, à la disparition de certains oiseaux et autres animaux dans certaines zones. La santé des consommateurs est aussi affectée. Face à cette situation dramatique, il faut d’urgence envisager des alternatives aux pesticides !
Dans le but d'éviter ces problèmes, d’autres formes et produits de protection des cultures commencent à être envisagées, notamment l’utilisation des biopesticides.
Les biopesticides, des produits capables de remplacer valablement les pesticides de synthèse.
Biopesticide est un terme générique qui englobe différentes méthodes de contrôle des maladies et animaux qui causent des nuisances aux cultures. Les recherches permettent de plus en plus de mettre au point une série de nouvelles approches en protection des plantes, notamment le développement des produits qui sont surtout basés sur la stimulation des défenses naturelles des plantes. Actuellement, on recherche une série de produits comme les huiles essentielles, comme des extraits de plantes, les plantes aromatiques, etc.
C’est grâce aux progrès de la compréhension des mécanismes de résistance des plantes que l’utilisation de tels produits est devenue sans cesse croissante. Ce sont des produits naturels et biodégradables qui vont sans nul doute remplacer avantageusement les pesticides synthétisés dans les usines chimiques. Etant naturels, ils ne présentent pas de risques pour l’environnement et la santé de l’homme et celle des animaux. Ils valorisent en outre les défenses naturelles des plantes tout en conjuguant la préservation de l’environnement et la production intensive de produits agricoles.
Même si les avantages rapportés aux biopesticides sont nombreux et intéressants, leur utilisation reste limitée suite surtout à leur coût relativement élevé ; d’où il faudrait envisager des voies et moyens de les rendre économiquement accessibles. |
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Un biopesticide élaboré à partir des « déchets » de crevettes.
L’activité humaine, surtout celle pratiquée à l’échelle industrielle, produit d’importantes quantités de déchets. La situation devient inquiétante lorsque ces déchets sont localisés aux abords des cours d’eau. En guise d’exemple, les déchets issus de la transformation des produits de la mer (animaux ou plantes consommés par les êtres humains): ils sont à l’origine de gros problèmes de pollution au niveau des côtes de l’Afrique de l’ouest. Heureusement, une grande partie de ces déchets peuvent être transformés en produits utiles et commercialisables. Ainsi, une sorte de « vaccin » susceptible d’activer le « système immunitaire » de la plante peut être créée à partir de restes de crevettes, rendant résistante une plante initialement sensible à un germe de maladie. Cette méthode de lutte naturelle pourra constituer une alternative à l’utilisation des pesticides de synthèse dommageables à la santé et à l’environnement.
Si d’autres méthodes anciennement utilisées pour fabriquer des produits qui lui sont proches faisaient recours aux procédés préjudiciables à l’environnement (produits extrêmement dangereux et utilisés en grandes quantités) et exigeaient une grande quantité d’énergie, la nouvelle méthode utilisée est quant à elle respectueuse de l’environnement.
Le procédé mis au point en vue de fabriquer ce « vaccin », en plus de n’utiliser que des produits ne présentant pas d’impact sur l’environnement, contribuera à la réduction de son prix et favorisera ainsi son adoption. En effet, ce procédé consiste en une transformation des carapaces des crevettes à l’aide des produits naturels, à usage courant et bon marché.
Expérimentation du produit élaboré et les résultats obtenus
La méthode consiste à pulvériser le produit sur une plante. La plante sur laquelle est pulvérisé le produit se croit attaquée par des parasites. Grâce à cette fausse alerte, la plante mobilise ses mécanismes naturels de défense. Elle est dès lors prête à se défendre en cas d'une attaque réelle contre plusieurs sortes de parasites. Cela ressemble à l'action d'un vaccin. En plus, cette activation est assez générale, ce qui permet de protéger la plante contre tout un ensemble de problèmes.
Cette méthode a déjà été testée en laboratoire, avec des résultats très encourageants.
En effet, des plantes de tomates ont été cultivées durant trois semaines dans des contenants standards, en serre éclairée en permanence et à une température de 28°C. Elles ont été arrosées à l’aide de l’eau distillée et d’une solution nutritive.
La solution à base du produit élaboré à partir des carapaces de crevettes a été pulvérisée sur une partie des plants, les autres ayant servi de témoins.
Trois jours après le traitement, toutes les plantes ont été infectées en déposant des gouttes contenant les germes qui causent une pourriture chez la tomate. Deux jours après le traitement, les plantes qui avaient été préalablement pulvérisées résistaient bien à la maladie, qui ne s'est pas répandue au-delà des gouttes appliquées. La situation était bien différente pour les autres plantes qui ont été attaquées par la maladie.
Conclusion
Un « vaccin » élaboré à partir de restes des crevettes a permis de mobiliser les mécanismes de défense des plantes, en leur permettant de résister contre une maladie. A partir des résultats de cette étude, le pourcentage de protection a été évalué à 95% par rapport à celui d'un pesticide largement utilisé pour lutter contre cette maladie. Cet exemple montre qu’il est possible de protéger des cultures en utilisant des produits naturels qui ne présentent pas d’impact négatif sur l’environnement et la santé. Le procédé d’élaboration du produit, à la fois low-cost et respectueux de l’environnement, rendra possible l’adoption et l’utilisation de la méthode par plusieurs agriculteurs. Aussi, cette valorisation des « déchets » en un produit utile permettra également de résoudre avantageusement des problèmes liés à la pollution qu’ils présentent au niveau des cours d’eau. |