Supernova et binarité
Ces rayons cosmiques galactiques sont accélérés dans des environnements liés aux étoiles massives, principalement dans l’entourage des résidus de supernova. Quand l’explosion a lieu, il y a contraction du cœur de l’étoile jusqu’au stade d’étoile à neutrons ou trou noir, mais les couches extérieures sont violemment expulsées, à très haute vitesse, plusieurs milliers de kilomètres par seconde. Cela va créer des chocs avec la matière interstellaire environnante, des chocs qui sont capables d’accélérer des particules. Une partie de l’énergie mécanique va en effet être transmise à des particules (provenant de l’étoile ou de la matière environnante) qui vont alors atteindre des vitesses très élevées et constituer ainsi les rayons cosmiques. Ce mécanisme est sans doute la source principale de rayons cosmiques d’origine galactique.
Les recherches de Michaël De Becker explorent une piste complémentaire permettant d’expliquer l’accélération des particules, notamment dans le cas des rayons cosmiques de plus basse énergie. Leur source serait bien des étoiles massives mais plus précisément des paires d’étoiles massives, des systèmes binaires. On sait aujourd’hui qu’une fraction importante de la population des étoiles massives est constituée de systèmes doubles, parfois triples. Le scénario envisagé par le chercheur liégeois n’est donc pas isolé mais concerne un grand nombre de systèmes.
« La binarité est très importante, explique Michaël De Becker, car s’il y a deux étoiles, les vents stellaires vont entrer en collision et cela donne lieu à des chocs hydrodynamiques qui rappellent un peu un choc de supernova mais avec une géométrie différente. Au lieu d’avoir comme dans le cas du résidu de supernova une géométrie sphérique, une coquille qui s’étend dans toutes les directions, il y a ici deux fronts de choc en vis-à-vis et c’est au niveau de ces fronts que l’accélération des particules va intervenir.»
La capacité de ces objets à accélérer des particules a été révélée par des observations dans le domaine radio. Dans les années 1980, des observateurs ont constaté des anomalies dans les émissions radio de certaines étoiles massives. Des anomalies qui ont révélé un rayonnement synchrotron c’est-à-dire émis par des électrons animés d’une vitesse proche de celle de la lumière en présence d’un champ magnétique. Ce qui a confirmé à la fois la présence d’un champ magnétique mais aussi celle d’une population d’électrons relativistes. Et donc la présence d’un puissant système d’accélération puisqu’au départ, ils n’ont pas ces énergies-là. ![Nuage moléculaire Barnard68. Nuage moléculaire Barnard68]()
« On peut donc dire, résume Michaël De Becker, que les étoiles massives interviennent à deux niveaux dans la formation des rayons cosmiques galactiques de basse énergie. Tout d’abord, pendant les millions d’années –souvent une dizaine- qui précédent l’explosion en supernova, ces systèmes massifs binaires sont capables de jouer le rôle d’accélérateur de particules. Ensuite, lors de l’explosion en supernova. Certes, pendant les millions d’années de vie des binaires, l’accélération des particules se fait avec une efficacité moindre que pour les résidus de supernovae, mais les résidus ne sont efficaces que pendant quelques milliers d’années. »