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Peste soit de ces insectes !
03/05/2013

Boscia senegalensisAprès deux ans d’expérimentations, les résultats obtenus par Momar Talla Guèye  se sont montrés édifiants. Répandu par fumigation dans un environnement confiné tel qu’un silo étanche, Boscia permet de protéger efficacement les céréales et les légumineuses contre cinq espèces d’insectes réputés parmi les plus ravageurs. Notamment le redoutable Prostephanus truncatus, introduit accidentellement en Afrique à la fin des années septante et découvert par Momar Talla Guèye  lui-même au Sénégal en 2008. Réputé pour ses dégâts importants sur le maïs et les cossettes sèches de manioc, le grand capucin du maïs - son nom français - est certes combattu avec efficacité par les pesticides de synthèse ; mais, comme souvent, cette lutte se déroule sans réelle maîtrise des conditions d’utilisation par les cultivateurs.

Encore fallait-il savoir à quelles doses les feuilles et les fruits de Boscia sont les plus efficaces… Ces informations sont désormais disponibles. « A raison de 2 % (en poids), l’utilisation du végétal en provenance de l’ouest du pays (région de Dakar) entraîne 100 % de mortalité chez les cinq espèces d’insectes étudiées (Prostephanus truncatus, Caryedon serratus, Callosobruchus maculatus, Tribolium castaneum et Sitophilus zeamais). Plus on monte en latitude, plus la teneur en précurseur de la molécule active (la glucocapparine) est élevée et, donc, moins il faut de végétal pour rendre le traitement efficace. C’est ce qu’on peut appeler l’« effet terroir » : la toxicité du produit pour les insectes est liée à divers facteurs (climatiques, pédologiques, écologiques, etc.). En outre, l’état physiologique de la plante est d’une grande importance: la teneur en glucocapparine est maximale en décembre et en janvier. A la saison des pluies (de fin juillet à novembre), elle peut diminuer d’un facteur 30 ! Le fruit, en tout cas, est presque toujours plus efficace que la feuille, même s’il contient souvent moins de métabolite secondaire ».

Mais les travaux du chercheur sont allés plus loin encore, démontrant que la fumigation par Boscia est capable de s’en prendre aux larves et aux œufs de certains ravageurs. Les larves de la bruche du niébé et de la bruche de l’arachide, par exemple, vivent à l’intérieur du grain et consomment celui-ci avant de s’en extraire sous la forme adulte. Le grain peut encore servir de semence, certes, mais celle-ci pourra péricliter rapidement faute d’éléments nutritifs en suffisance. « Pour venir à bout des larves et des œufs, il est impératif de doubler, voire quadrupler, la dose de Boscia utilisée par rapport aux adultes, précise Momar Talla Guèye. Cet effet, que l’on peut qualifier de foudroyant, n’a pu être démontré que grâce à la mise au point - trois ans de travail en complément aux travaux du Dr Dogo Seck - d’une méthode de dosage du Méthyl isothiocyanate, mise au point en collaboration avec le Dr Joeri Vercammen (Intersciences, Louvain-la-Neuve). J’ai également démontré que cette faculté de pénétration du Boscia n’est pas de nature à altérer le pouvoir germinatif du grain, ce qui le positionne comme une alternative très sérieuse aux pesticides de synthèse dans la conservation des semences en milieu confiné». Déjà, une application pratique est prévue : une fiche technique devrait être élaborée très prochainement à destination directe des agriculteurs. Les doses à utiliser y seront indiquées sur la base des contenants disponibles sur les lieux-mêmes de leur travail : pots, ustensiles divers, etc.

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