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Peste soit de ces insectes !
03/05/2013

En Afrique, et particulièrement dans la bande sahélienne, la prédation des insectes sur les récoltes et les stocks de céréales ou de légumineuses peut s’avérer catastrophique, tant pour l’agriculteur que pour la balance commerciale des pays concernés. En raison de multiples inconvénients, les ripostes basées sur le recours aux pesticides de synthèse ont de moins en moins la cote. Allié à un certain « retour » aux pratiques paysannes traditionnelles, l’usage de substances naturelles issues des végétaux peut s’avérer tout aussi efficace.

charancon maisCertains ont coutume de dire qu’en Afrique, le paysan travaille pour… les insectes. L’adage est cruel et fataliste. Il n’en illustre pas moins un problème bien réel : autant sinon plus que les cultures elles-mêmes, ce sont les stocks alimentaires constitués après la récolte, de même que les semences, qui sont les plus fragiles face aux attaques des ravageurs. Ainsi, sous les tropiques, les stocks de céréales et de légumineuses sont régulièrement détruits jusqu’à 30 %, voire plus, principalement à cause des attaques des coléoptères. L’arachide et le niébé (une sorte de fève, d’une taille moyenne) sont parmi les végétaux les plus sensibles aux infestations des insectes.

Ce phénomène est certes combattu depuis la nuit des temps par des générations d’agriculteurs.  Mais des éléments nouveaux  - le réchauffement climatique et la répétition des crises alimentaires mondiales - ne font qu’exacerber les problèmes récurrents (agronomiques, climatologiques, économiques, politiques…) rencontrés par les pays du Sahel, par exemple, exposés au manque de ressources alimentaires. Dans les principaux pays de cette gigantesque région, les rendements agricoles restent traditionnellement en dessous des besoins alimentaires, et de loin. Pour nourrir sa population, un pays comme le Sénégal doit importer chaque année près de 600.000 tonnes de riz, soit une dépense avoisinant les 140 milliards de francs CFA.

Cette situation de dépendance n’est plus tenable. Que faire ? Protéger les récoltes au moyen de pesticides ? C’est, certes, la voie la plus souvent empruntée depuis plusieurs décennies. Une solution de facilité, sans aucun doute : l’insecte ravageur meurt (à la condition que le produit soit efficace et… bien utilisé) et les denrées sont indemnes. Mais à quel prix pour l’environnement et la santé ? En Afrique comme ailleurs, les cas d’intoxication aiguë, parfois à l’origine de décès, sont régulièrement dénoncés dans la presse et le débat public. Mais les intoxications chroniques à l’origine de cancers et de maladies neuro-dégénératives, probablement abondantes, sont nettement moins commentées. C’est que l’écrasante majorité des paysans ignore les consignes de sécurité ou est dépourvue des moyens élémentaires de protection. « La couleur du sachet semble être le critère le plus retenu dans le choix du pesticide », commente le Dr Momar Talla Guèye, auteur d’une récente thèse de doctorat consacrée aux moyens de protections à base de plante à Gembloux Agro-Bio Tech/Université de Liège (1). Les pesticides de synthèse posent aussi un autre problème: la résistance croissante des insectes aux molécules chimiques. « Aucun groupe parmi les organophosphorés, organochlorés, pyréthrinoïdes ou encore fumigants n’échappe à ce phénomène de résistance, commente le chercheur. Il faut sans cesse synthétiser de nouvelles molécules ».

(1) Gestion intégrée des ravageurs de céréales et de légumineuses au Sénégal par l’utilisation de substances issues des plantes.

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