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NDE : l'ultime frontière ?
18/04/2013

De nombreuses théories neurologiques ont également été proposées pour expliquer les NDE. « Toutes ne sont pas plausibles, dit Steven Laureys. Ainsi, il en est une qui assimile ces expériences subjectives à des hallucinations consécutives à l'administration de certaines drogues durant la phase de réanimation. Or des NDE peuvent survenir en dehors du cadre médical, par exemple lorsque des personnes échappent à la noyade. » À l'heure actuelle, nous l'avons souligné, les théories neurologiques les plus pertinentes associent les diverses composantes des NDE à un dysfonctionnement de régions cérébrales spécifiques ayant été lésées, notamment à la suite d'un traumatisme crânien ou du manque d'oxygène provoqué par un arrêt cardiaque.

Nous avons évoqué le cas des OBE, qui peuvent être provoquées par un dysfonctionnement de la région temporo-pariétale droite. Il est bien documenté également que la région temporo-pariétale gauche, aisément lésée en cas de mauvaise oxygénation, est impliquée dans la sensation d'une présence à proximité de soi. « La région temporo-pariétale est une région associative multimodale qui intègre les différentes informations sensorielles (visuelles, auditives, proprioceptives et autres) et qui, par là même, joue un rôle crucial lorsqu'il faut opérer la distinction entre soi et autrui », précise le responsable du Coma Science Group.

On sait par ailleurs que des patients épileptiques dont le foyer épileptogène se situe dans l'hippocampe, structure dont on connaît l'importance dans les phénomènes de mémorisation, peuvent avoir le sentiment de revivre leur vie en un éclair, comme dans certaines NDE. Or l'hippocampe est très sensible au manque d'oxygène.

Le cortex pariétal postérieur, lui aussi, souffre beaucoup en cas d'anoxie. Il a été identifié comme étant le support de la sensation que l'on peut éprouver d'une union avec le cosmos ou d'un accès à une expérience spirituelle. C'est ce qui ressort notamment d'études en IRMf réalisées en 2009 chez des religieux par des chercheurs de l'Université de Californie.

« En cas d'arrêt cardiaque ou de traumatisme crânien, tout le cerveau souffre, mais particulièrement certaines régions qui, n'étant irriguées que par de petites artérioles, sont les plus vulnérables au manque d'oxygène, fait remarquer Steven Laureys. Ce sont elles dont nous suspectons l'implication dans les phénomènes de NDE. »

L'exploration des souvenirs

Avant d'utiliser la neuroimagerie pour asseoir cette présomption et pour mener des investigations systématiques visant à mieux cerner les corrélats neuronaux des différentes composantes des NDE, le Coma Science Group et l'Unité de Psychologie Cognitive de l'ULg ont uni leurs efforts dans le but d'identifier, au moyen d'outils validés en psychologie, les caractéristiques des souvenirs relatés par les personnes ayant été confrontées à une expérience personnelle de mort imminente. Leurs récits font-ils appel à de pures créations imaginaires ou, au contraire, à des souvenirs revêtant les attributs de souvenirs d'événements réels ? « La description des caractéristiques phénoménologiques des souvenirs rapportés par les personnes concernées peut aider à orienter la recherche des corrélats neuronaux impliqués dans les NDE », indique Marie Thonnard.

Sur quels éléments, autres que la plausibilité, les psychologues se basent-ils pour opérer le tri entre souvenirs réels et souvenirs imaginés ? «Généralement, les premiers sont plus riches en détails sensoriels (visuels, auditifs, etc.), autoréférentiels (ce qui a trait au sujet lui-même) et émotionnels », explique Hedwige Dehon, docteur en sciences psychologiques et assistance au sein de l'Unité de Psychologie Cognitive de l'ULg. Le plus souvent, les caractéristiques phénoménologiques de ces deux types de souvenirs sont donc différentes.

Publiée dans PLoS One le 27 mars 2013, l'étude liégeoise regroupait 39 volontaires selon la clé de répartition suivante : 8 personnes ayant vécu une NDE, 6 ayant des souvenirs d'un coma sans NDE, 7 ayant eu un coma mais n'en conservant aucun souvenir, 18 sujets contrôles. Les critères d'inclusion dans l'étude en tant qu'« expérienceur », c'est-à-dire personne ayant été confrontée à une expérience personnelle de mort imminente, se référaient à l'échelle de Greyson, la plus usitée en la matière. Explorant plusieurs dimensions (cognitive, affective, paranormale...), cette échelle se fonde sur 16 questions pouvant donner lieu chacune à un score de 0, 1 ou 2. On parle de NDE lorsque le score total obtenu par un sujet ayant répondu aux 16 questions est de 7 ou plus (sur 32).

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