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NDE : l'ultime frontière ?
18/04/2013

Faut-il y voir la preuve définitive que le ressenti d'une expérience de sortie hors du corps (et plus largement toute NDE) est étroitement lié au fonctionnement cérébral, que tout vient du cerveau ? D'aucuns le réfutent, mais leur argumentation est pauvre sur le plan scientifique.

Désireux de combattre les interprétations « magiques », le Coma Science Group a initié, en collaboration avec l'Unité de Psychologie Cognitive de l'ULg, des recherches afin d'explorer le versant neuro-anatomique des NDE chez des patients ayant survécu à un arrêt cardiaque. Le recours à un vaste éventail de moyens est prévu : imagerie par résonance magnétique structurelle (IRM) et fonctionnelle (IRMf), tomographie par émission de positons (PET), électroencéphalographie à haute densité, exploration neuropsychologique standardisée. Leur hypothèse est que chaque composante d'une NDE - tunnel et lumière, symbiose avec le cosmos, OBE, etc. - est imputable à l'atteinte spécifique d'une région cérébrale en raison, par exemple, d'un traumatisme crânien ou de l'anoxie pouvant être associée à un arrêt cardiaque.

Pour qu'on parle de NDE, il n'est pas nécessaire que le sujet concerné ait « vécu » l'ensemble des épisodes caractéristiques du phénomène, mais certains d'entre eux. Nous l'avons dit, la sensation de quitter son corps se rencontre en moyenne dans un tiers des cas. Percevoir une lumière brillante au fond d'un tunnel ou voir défiler sa vie, idem. En d'autres termes, toutes les expériences de NDE ne sont pas semblables.

La vie après la vie

Eu égard aux conditions chaotiques dans lesquelles apparaissent les NDE, il est quasiment impossible de les étudier en temps réel. Aussi les chercheurs liégeois ambitionnent-ils de mettre en relation les caractéristiques des expériences de mort imminente rapportées par les patients participant à leurs études avec d'éventuelles lésions résiduelles dans les régions cérébrales susceptibles d'être responsables du vécu peu commun qu'ils relatent. « La sensibilité des techniques d'imagerie nous permet de rechercher, même des années après un épisode de NDE, de minuscules cicatrices, une infime activité épileptique, de petits œdèmes ou de légers dépôts de sang témoignant de microlésions dans telle ou telle région cérébrale », précise Steven Laureys.

Des choses troublantes ont été racontées à propos de certaines NDE. Ainsi, d'aucuns affirment que, une fois réanimés, des patients ont pu reconstituer les conversations et les actes du personnel médical occupé à les maintenir en vie et même décrire ce qui s'était passé dans les pièces voisines. Mais la relation de cas isolés pèse de peu de poids en science ; la crédibilité passe par la méthodologie scientifique contrôlée et la loi du nombre. Car il faut faire la part du hasard statistique, des interprétations peu rigoureuses et de la fumisterie. D'autant que les NDE ont parfois suscité les récits d'« illuminés de bonne foi » ou tracé le sillon d'un opportunisme mercantile. Tel auteur vous dira avoir acquis le don de parler aux fées. Tel autre vous enseignera la manière de prendre connaissance de vos vies antérieures... Manipulation ? Autopersuasion ?... Les résultats de l'étude liégeoise publiée dans PLoS One sur les caractéristiques des souvenirs de NDE soulèvent un coin du voile.

La main de Dieu ?

Pour certains, les expériences de mort imminente constituent la preuve de l'existence d'une vie après la mort. D'où le titre du best-seller du psychologue et médecin américain Raymond Moody : La vie après la vie (1975). Quelles que soient les convictions de chacun à propos de l'âme et de l'au-delà, il ne devrait échapper à personne que ce raisonnement repose sur des sables mouvants. En effet, par définition, aucun de ceux qui ont rapporté un vécu de NDE n'a connu la mort au moment de cette expérience hors du commun, sinon il n'aurait pu relater ensuite son histoire. Aussi les NDE ne nous permettent-elles pas de tirer la moindre conclusion au sujet d'un au-delà auquel chacun reste, en outre, libre de croire ou de ne pas croire.

Attention ! Il n'y a pas que les croyants qui font des NDE et en ressortent convaincus de l'existence de Dieu. On recense également des témoignages d'athées qui se convertissent après une telle expérience, mais aussi des témoignages de croyants qui n'y voient pas la main de Dieu. « Néanmoins, les souvenirs de NDE sont le plus souvent colorés par les grandes croyances culturelles, philosophiques et religieuses de départ, indique Vanessa Charland-Verville, aspirante FNRS, doctorante en sciences médicales et coauteur de l'article paru dans PLoS One. Ainsi, si la description d'un faisceau de lumière est présente dans toutes les cultures, quelques variantes peuvent parfois être observées au niveau de la représentation des différentes composantes. Par exemple, les bouddhistes peuvent rapporter une rivière au lieu d’un tunnel tandis que pour les musulmans, ce sera plutôt une grande porte ; les hindous rapporteront parfois la vision d’un sage tournant les pages d’un livre et les catholiques se représenteront les êtres de lumière comme étant des anges. »

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