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Les petits dessous du Viagra féminin…
20/02/2013

L’annonce de la mise au point, par l’équipe liégeoise, d’un spray nasal de testostérone destiné à améliorer la vie sexuelle des femmes – un « Viagra féminin » ! – a eu l’heur d’attirer l’attention des médias. Mais pour les chercheurs, dont le Tefina (c’est son nom) ne représente qu’une part tout à fait anecdotique de l’activité, une telle expérience est un travail presque routinier : le Laboratoire de pharmacie galénique de l’Université de Liège mène beaucoup de recherches innovantes bien plus complexes que la mise au point de ce spray nasal. Mais, au fait, pourquoi cette voie d’administration si particulière ? On prend bien la pilule contraceptive par la bouche, pourquoi pas de la testostérone ?

C’est par un drôle de détour que les projecteurs de l’actualité se sont braqués sur le laboratoire de pharmacie galénique de l’Université de Liège. C’est en effet l’annonce de la mise au point, par l’équipe liégeoise, d’un spray nasal de testostérone destiné à améliorer la vie sexuelle des femmes – un « Viagra féminin » ! – qui a eu l’heur d’attirer l’attention des médias. Mais pour les chercheurs, dont le Tefina (c’est son nom) ne représente qu’une part tout à fait anecdotique de l’activité, une telle expérience est légèrement frustrante. « Notre discipline est assez peu connue ; il est très rare qu’on en parle dans la presse, admet le Professeur Brigitte Evrard, qui dirige le laboratoire et qui a affronté son baptême du feu face aux journalistes. Et pourtant, nous menons beaucoup de recherches innovantes et bien plus complexes que la mise au point de ce spray nasal » (lire l'encadré). Profitons donc de l’occasion pour découvrir cette discipline, la pharmacie galénique dont les ramifications sont en effet étonnamment multiples. Et pour fil rouge, si nous prenions…la mise au point d’un spray nasal ?

Pourquoi pas par la bouche ?

D’abord, pourquoi cette voie d’administration si particulière ? On prend bien la pilule contraceptive par la bouche, pourquoi pas de la testostérone ? Il faut savoir que tout médicament pris par la voie orale classique passe à travers le tube digestif, d’où il est résorbé via le réseau de veines qui drainent l’intestin et qui aboutissent au foie via la veine porte. Or le foie est notre principale usine de détoxification : il métabolise toutes les molécules étrangères qui lui parviennent pour les préparer à être excrétées soit dans l’intestin (retour à l’expéditeur, en quelque sorte), soit via les reins. Ce système dit « de premier passage hépatique » constitue une excellente barrière contre les empoisonnements …mais est aussi responsable d’une perte considérable d’efficacité de la plupart des médicaments que nous avalons. Dans le cas des hormones de type testostérone, œstrogènes, etc., l’effet de premier passage hépatique est fort important.  C’est notamment le cas avec la pilule contraceptive, ce qui impose l’administration de doses importantes pour atteindre au final un taux sanguin efficace. La voie orale, qui nous semble tellement évidente n’est pas toujours la plus efficace. 

voies-administrationPlus intéressantes sont les voies d’administration alternatives – l’un des axes de recherche du laboratoire de galénique liégeois – qui permettent de court-circuiter ce passage obligé par le foie. C’est le cas de la voie transdermique (patchs, gels), pulmonaire (puffs, inhalations), rectale (suppositoires), intra-utérine et vaginale (stérilets hormonaux, anneaux vaginaux), sub-linguale (parce que la muqueuse buccale n’est pas inféodée au système de la veine porte), et bien sûr, trans-nasale. Par exemple, dans le cas des hormones à visée contraceptive, l’utilisation d’anneaux vaginaux qui délivrent progressivement une combinaison œstro-progestative permet de diminuer de 20 fois la dose administrée par une micropilule orale ! Or, dans le cas de la testostérone dont les effets secondaires masculinisants – hyperpilosité, raucité de la voix – sont très …indésirables chez la femme, il faut éviter à tout prix de donner des doses élevées. On comprend donc qu’avec un rapport de l’ordre de 1 à 20, la voie orale ne soit pas la meilleure.

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