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L’évolution des poissons demoiselles
04/01/2013

Les théories actuelles de l’évolution tentent d’intégrer ces deux types de modèles : les systèmes qui présentent peu de contraintes (ceux pour lesquels de nombreuses niches écologiques sont disponibles, caractérisés par une diversification rapide et précoce) et les systèmes dominés par les contraintes (ceux pour lesquels un nombre bien défini de niches écologiques est disponible, induisant des convergences). La description de signatures permettant leur distinction serait bien utile aux biologistes comparatifs qui étudient la dynamique de diversification des clades.

C’est dans ce cadre que s’inscrivent les travaux de Bruno Frédérich, du Laboratoire de morphologie fonctionnelle et évolutive de l’Université de Liège, sur les poissons demoiselles (1). L’originalité de l’étude réside dans le fait que diverses techniques ont été intégrées. Ces techniques alliant écologie, morphologie et phylogénie (génétique) permettent de distinguer les modes de diversification possibles : unique radiation adaptative (« early burst ») ou radiations adaptatives répétées (convergence). « L’idée, déclare le chercheur, c’était  d’étudier le mode de diversification, à la fois écologique et morphologique, des poissons de récifs au sens large au cours de leur évolution. Produire des arbres phylogénétiques, beaucoup de gens le font. Mais cette approche multiple est propre au laboratoire de l’ULg ! ».

La famille des Pomacentridae, avec ses 386 espèces, représente le troisième groupe de poissons le plus grand dans les écosystèmes coralliens après les Gobiidae et les Labridae. Elle est divisée en cinq sous-familles: Stegastinae, Lepidozyginae (monospécifique), Chrominae, Abudefdufinae et Pomacentrinae. Ces poissons demoiselles se sont diversifiés en trois groupes trophiques majeurs :
(1) Les espèces zooplanctonophages qui se nourrissent de petits crustacés planctoniques, les copépodes.
(2) Les espèces brouteuses d’algues filamenteuses.
(3) Les espèces intermédiaires qui se nourrissent de zooplancton, de petits invertébrés benthiques et d’algues en proportions variables. Lire l'encadré sur la classification de Linné
Demoiselle_fermière
Certaines espèces brouteuses ont développé un comportement de « fermier » : elles défendent ardemment leur territoire en chassant tout intrus et gèrent les filaments denses d’algues comme leur propre ferme. « Elles cultivent leur champ en arrachant certaines algues qu’elle n’aiment pas et en laissant pousser d’autres. On dirait que c’est comme leur potager ! », déclare B. Frédérich. Vu que les espèces brouteuses n’ont pas toutes ce comportement, ces poissons « fermiers » sont considérés dans l’étude comme un groupe à part.

Arbre phylogénétique calibré en fonction du temps

Afin de déterminer si la diversification des Pomacentridae au cours de l’histoire évolutive s’est déroulée suivant une seule radiation adaptative (« early-burst ») ou suivant des radiations répétées induisant des convergences, le chercheur s’est tout d’abord intéressé à la phylogénie, c’est-à-dire l'étude des relations de parentés entre les différents espèces.

(1) Frédérich B, Sorenson L, Santini F, Slater GJ, Alfaro ME (2012). Iterative ecological radiation and convergence during the evolutionary history of damselfishes (Pomacentridae). The American Naturalist, in press.

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