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Comprendre et soigner l’endométriose
18/12/2012

Génétique ou environnement ?

On sait que des régurgitations de sang menstruel se produisent chez 90% des femmes ; pourquoi dès lors ne font-elles pas toutes de l’endométriose ? « Auparavant, on pensait que l’endométriose se développait chez celles dont les macrophages n’arrivaient pas à dégrader le sang qui avait reflué. Maintenant, nous avançons une autre théorie – que nous sommes sur le point de publier – selon laquelle c’est l’endomètre de ces femmes qui est différent, et que, au lieu de se nécroser et d’involuer, les cellules régurgitées vont se répandre, proliférer, adhérer ailleurs et donc se transformer en îlots d’endométriose. La cause de ces modifications serait épigénétique. »

On sait déjà que la génétique intervient dans la prédisposition à l’endométriose : les filles de mères qui ont souffert de cdouleur-ventreette affection ont 7 fois plus de risques d’en souffrir à leur tour. Des mutations bien précises ont été découvertes et publiées tout récemment. Mais ce terrain génétique n’est probablement pas suffisamment déterminant ; l’épigénétique vient sans doute y ajouter son grain de sel. En d’autres mots, ce serait l’expression des gènes qui serait perturbée, plutôt qu’un défaut au niveau des gènes eux-mêmes.

Nous en revenons donc à la recherche fondamentale. Avec l’énergie qui la caractérise, Michelle Nisolle porte actuellement plusieurs projets sur ce thème. « L’idée globale est de mettre en évidence des influences environnementales s’exerçant sur la santé de la femme. Il existe un précédent bien connu : celui de femmes qui ont été exposées in utero au diéthylstilbestrol (DES). On a mis en évidence, il y a déjà longtemps, que ces femmes développaient des cancers du col et du vagin, de l’infertilité et de modifications anatomiques de l’utérus. Mais une publication récente dans le New England Journal of Medicine (4) montre que, outre ces risques, ces femmes présentent aussi des fréquences plus élevées de fausses couches, de cancers du sein, de ménopauses précoces,… tous phénomènes qui peuvent être attribués à une dysrégulation endocrinienne. Ce qui nous permet de suspecter une influence des contaminants  environnementaux sur la sphère gynécologique, que nous voulons à présent investiguer. »

Une recherche multidisciplinaire

Etre à la tête d’un service universitaire de gynécologie, où aboutit un large éventail de pathologies, est évidement une position stratégique pour lancer une telle recherche. Des prélèvements sanguins et des biopsies réalisés chez les patientes seront envoyés pour analyse dans le service de toxicologie du professeur Corinne Charlier, qui a mis au point des méthodes pour détecter rapidement un assez grand nombre de toxiques environnementaux connus. En parallèle, la même démarche sera suivie avec des échantillons de sperme prélevés lors de consultations d’infertilité masculine. On sait en effet que le sperme enregistre également une perte de qualité constante, et cela de façon particulièrement préoccupante chez l’homme, en comparaison avec les autres mammifères.

(4) Adverse health outcomes in women exposed in utero to diethylstilbestrol, Hoover RN, Hyer M, Pfeiffer RM, Adam E, Bond B, Cheville AL, Colton T, Hartge P, Hatch EE, Herbst AL, Karlan BY, Kaufman R, Noller KL, Palmer JR, Robboy SJ, Saal RC, Strohsnitter W, Titus-Ernstoff L, Troisi R, in N Engl J Med 365 (2011) 1304-14.

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