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Comprendre et soigner l’endométriose
18/12/2012

Diagnostic malaisé, traitement décevant…

« Quand une femme consulte pour un problème d’infertilité, nous avons 30 à 40% de chances de trouver chez elle de l’endométriose ; chez celles qui consultent pour un problème de douleurs, ce chiffre monte à environ 70%  », affirme Michelle Nisolle qui souligne que, paradoxalement, cette affection est très souvent sous-diagnostiquée, amenant beaucoup de femmes à un interminable shopping médical. On estime qu’il s’écoule souvent entre 5 et 10 ans entre le début des symptômes et le diagnostic…

Lésion-vésiculaireA décharge, il faut préciser que c’est une affection très difficile à diagnostiquer, et que seule une laparoscopie permet de visualiser les lésions – et encore, à condition d’avoir l’œil exercé ! « Ces lésions sont parfois très discrètes mais avec un peu d’habitude, quand on « palpe » le tissu avec nos instruments, on peut sentir qu’il y a un épaississement localisé. Sans compter que certaines lésions  sont cachées derrière un péritoine d’apparence saine », reprend Michelle Nisolle. Elle est bien placée pour en parler : sa thèse d’agrégation, en 1996, comportait une classification de l’endométriose en trois types – péritonéale, ovarienne et recto-vaginale – classification utilisée aujourd’hui partout dans le monde. « Dans un premier temps, décrit-elle, les endométrioses péritonéales sont des lésions rouges, parce que l’endomètre qui reflue vient se déposer sur le péritoine, qui est fort vascularisé. Puis il est progressivement recouvert, englobé par le péritoine, et la lésion va prendre un aspect noirâtre. Enfin, au fur et à mesure de l’apparition de fibrose, elle deviendra blanchâtre. Certaines de ces lésions vont disparaître spontanément, mais ce n’est pas la majorité. »

« Mon projet clinique consiste surtout à développer des stratégies thérapeutiques pour venir en aide à ces femmes, continue Michelle Nisolle. Ce qui n’est pas un enjeu mineur, parce que beaucoup de couples craquent, soit à cause des problèmes de douleurs lors des relations sexuelles, soit à cause de la tension provoquée par l’attente d’une grossesse qui ne vient pas. Or, s’il existe toute une batterie de médicaments contre l’endométriose, peu sont véritablement efficaces. »

Dans l’état actuel des connaissances, on se contente surtout de calmer la symptomatologie : soit en prescrivant des antidouleurs ou des anti-inflammatoires pour atténuer les douleurs, soit en supprimant les cycles hormonaux avec des contraceptifs ou d’autres médicaments. S’il n’y a plus de règles, il n’y a plus de douleurs… Mais dans les deux stratégies, l’endométriose reste bel et bien en place. Elle ne progresse plus mais ne régresse pas non plus. Et au moment où viendra un désir de grossesse, le problème ne sera pas résolu… C’est donc surtout pour des problèmes d’infertilité que les médecins sont amenés à intervenir chirurgicalement. « C’est une chirurgie difficile, plus difficile que celle du cancer, en raison des nombreuses adhérences que provoque la maladie elle-même. On est donc dans un terrain fort inflammatoire, où il devient parfois même difficile de distinguer les organes les uns des autres », souligne Michelle Nisolle, dont la réputation de chirurgienne s’étend au-delà de l’Atlantique (lire « Robot ou énergie plasma ?»).

Une analogie avec le cancer ?

Des cellules baladeuses qui quittent leur muqueuse d’origine pour aller s’implanter ailleurs dans l’organisme, ce n’est tout de même pas banal… On ne peut s’empêcher de songer aux similitudes avec des  métastases s’échappant d’une tumeur maligne pour aller proliférer dans d’autres tissus. Une analogie qui n’avait pas échappé à Michelle Nisolle, ni d’ailleurs au Professeur Jean-Michel Foidart quand il a proposé à la chercheuse, en 2002, de venir continuer au sein de son laboratoire de biologie des tumeurs du GIGA-cancer les travaux qu’elle avait entamés à l’UCL.

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