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Faut-il bannir l’huile de palme ?
12/12/2012

Autant dire que, malgré son défaut nutritionnel majeur (sa richesse en acides gras saturés augmente sensiblement le risque de maladies cardio-vasculaires), un tel produit miracle ne se remplace pas aisément. Voyons quelques-unes des principales alternatives. Avoir recours à d’autres huiles végétales ? Parfois, c’est possible mais, pour une majorité d’applications, la fraction solide de l’huile de palme est indispensable. En outre, malgré ses impacts négatifs en termes de déforestation, le palmier à huile exige souvent moins de pesticides et de fertilisants que d’autres cultures plus ou moins proches (colza, soja…). Avoir recours à des matières grasses animales (laitières)? Les qualités sensorielles du produit fini seraient modifiées, sans parler d’une conservation plus aléatoire. Sur le plan nutritionnel, l’inconvénient serait identique à la situation actuelle: les matières animales contiennent, elles aussi, des acides gras saturés (2). Troisième voie possible: utiliser des matières grasses hydrogénées. Un tel scénario reviendrait à effectuer une volte-face radicale : riches en acides gras trans, hautement préjudiciables à la santé, ces graisses hydrogénées ont été en bonne partie bannies par les distributeurs sous la pression des consommateurs. De plus, les surfaces à cultiver dans ce cas (colza, soja, etc.) seraient sensiblement augmentées, au détriment des écosystèmes naturels.

Réduire toutes les matières grasses

La conclusion saute aux yeux : quelle que soit la manière d’aborder le problème, il faut réduire la consommation des matières grasses. De toutes les matières grasses. « Ce n’est pas seulement l’huile de palme qu’il faut réduire, mais l’ensemble des produits transformés, qui contiennent de grandes quantités de matières grasses, et notamment de graisses saturées, précise Sophie Delacharlerie. Le consommateur ne peut pas réclamer la fin de l’huile de palme au nom d’une série de principes généreux tout en continuant, parallèlement, à utiliser régulièrement des préparations alimentaires sophistiquées ou des pâtes à tartiner chocolatées. Un effort d’éducation et de sensibilisation s’avère primordial ». 

Or, c’est là que le bât blesse. En interrogeant en face à face 210 consommateurs choisis au hasard dans 7 grandes villes belges, les chercheurs du Laboratoire Qualité et Sécurité des Produits Agro-alimentaires ont fait la découverte suivante : si 32 % des personnes interrogées se sont montrées méfiantes envers les matières grasses saturées et hydrogénées pour des raisons de santé, pas loin de la moitié de celles-ci fondaient leur raisonnement sur des argumentations scientifiquement erronées. Le plus surprenant est que ce constat ne concerne pas uniquement le « grand public », mais aussi des cercles jugés a priori plus « avertis ». L’équipe de Marianne Sindic s’est en effet intéressée également aux connaissances de 35 personnes dotées d’un profil de chercheur ou d’étudiant dans les champs de la chimie, la biologie, l’agronomie, etc. Si, parmi ce groupe, l’enjeu environnemental de la culture du palmier est mieux appréhendé que par le public « tout venant », les aspects nutritionnels ne semblent pas mieux maîtrisés pour autant : le tiers des raisonnements invoqués en matière nutritionnelle par ce public plus « scientifique » s’est avéré erroné. « Il semble qu’au supermarché, scientifiques ou pas, nous sommes tous avant tout des consommateurs, explique Sophie Delacharlerie. A ce titre, nous sommes influencés par une somme d’informations publicitaires ou médiatiques orientées en tous sens. Au moment de l’achat, le prix et les qualités organoleptiques restent des facteurs déterminants ».

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(2) Certaines études livrent toutefois, aujourd’hui, des résultats plus indulgents à l’égard de certains profils d’acides gras. Ce qui a permis à leurs auteurs, par exemple, de réhabiliter le beurre.

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