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L’énergie, pas la bombe !
16/10/2012

Mais la plus grande préoccupation vient de l’Irak, signataire du TNP, mais dont on découvre le programme nucléaire clandestin à la fin de la « guerre du Golfe » de 1990-1991. Les révélations sur l’ampleur du programme irakien de recherche militaire provoquent une crise sans précédent des régimes de lutte contre la prolifération des armes nucléaires. Elles montrent en effet que la ratification du TNP et les accords de garantie avec l’AIEA n’assurent pas suffisamment l’absence d’actions « proliférantes ». La ratification du TNP assurait même une certaine respectabilité à Bagdad, qui soumettait officiellement toutes ses installations nucléaires aux contrôles réguliers de l’Agence, sans que ses inspecteurs n’aient jamais constaté de détournement des matières utilisées. Mais ils ne visitaient pas les  sites clandestins de l’Irak, non déclarés à l’AIEA. Car, à l’époque, l’Agence ne disposait pas d’un mandat lui permettant d’inspecter d’éventuels sites suspects, ce qui est le cas depuis lors… Par ailleurs, l’Irak recourait largement aux biens à double usage, camouflant leur utilisation finale sous des demandes de licences d’exportation de biens à destination agricole, médicale, etc. Cette découverte prouve en tout cas qu’un État résolument disposé à élaborer une arme nucléaire est prêt à toutes les ruses, même très coûteuses, pour parvenir à ses fins. Habiles à profiter des failles du système, les exécutants de Saddam Hussein ont aussi bénéficié d’une certaine complaisance des États fournisseurs de l’Irak (3), pas trop regardants car plus soucieux de défendre leurs intérêts commerciaux que de veiller scrupuleusement à la non-prolifération, au risque de se faire ravir des marchés profitables par les pays concurrents. Enfin, l’Irak a bénéficié de l’appui informel des Etats-Unis, de l’URSS et de leurs alliés durant la guerre qui l’a opposé à l’Iran de l’imam Khomeiny, entre 1980 et 1988.

Contre les tricheurs, serrer la vis

En 1992, les irrégularités constatées par les inspecteurs de l’AIEA en Corée du Nord achèvent de convaincre la communauté internationale qu’il faut imposer, à l’avenir, une politique d’exportation plus restrictive. Dès cette année-là, l’AIEA entreprend donc un vaste mouvement de réformes visant à renforcer son système de vérifications, en vue de pouvoir débusquer plus efficacement des activités nucléaires clandestines, non déclarées à l’agence. Les nouvelles mesures octroient à l’Agence un accès plus larges aux informations, notamment par des prélèvements réalisés dans l’environnement, et un accès physique étendu par le recours à des inspections impromptues.

Suite aux attentats du 11 septembre 2001, la communauté internationale prend conscience du risque que représenterait l’acquisition d’armes de destruction massive (ADM) par des groupes terroristes. Le Conseil de sécurité de l’ONU adoptera dès lors une série de mesures, dont la résolution 1540 de 2004, par laquelle les États membres s’accordent à éviter l’accès de groupes non-étatiques à des ADM ou à leurs vecteurs, à ne pas leur prêter assistance, et à adapter leurs législations nationales respectives pour les rendre conformes à ces obligations. La résolution 1540 se conçoit comme un instrument complémentaire visant à renforcer le régime international de non-prolifération des ADM, dont le TNP.

En matière de non-prolifération des armes nucléaires, les États répugnent à concrétiser leurs engagements politiques par des traités ou des accords « formels », officiels, dont la précision et la clarté excluent toute équivoque. C’est la raison pour laquelle il n’existe, en la matière, que peu d’instruments formels, comme le TNP. Tir-missileC’est aussi pourquoi la plupart des instruments qui constituent le droit nucléaire relèvent davantage de principes vagues que d’engagements véritables, entraînant des obligations précises à l’égard des Etats. Pourquoi ? Parce que la multiplicité des intérêts politiques, stratégiques et économiques intervenant dans ce délicat domaine n’incite pas les États à s’engager de manière trop contraignante. C’est la raison pour laquelle le droit nucléaire est également constitué, outre le TNP et la résolution 1540 de l’ONU, d’un certain nombre d’instruments « informels ».

(3) Les principaux fournisseurs du programme nucléaire militaire irakien pendant les années 1980 furent l’Allemagne, les États-Unis, la France, l’Italie et le Royaume-Uni.

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