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Sons fantômes dans la tête
11/09/2012

Malheureusement, certaines personnes échappent au phénomène d'habituation et en viennent à considérer leur acouphène comme un désagrément de nature à saper leur qualité de vie. « Il n'est pas rare que l'acouphène se soit développé sur un terrain de fragilité préexistant fait d'anxiété, de stress ou de dépression, ce qui tend à en rendre la perception plus négative », dit Audrey Maudoux. Dans d'autres cas, peu fréquents, son intensité est telle qu'il devient insupportable en soi. Des sections chirurgicales du nerf auditif ont été tentées, mais sans résultat digne de ce nom. Initialement, on croyait en effet que les acouphènes résultaient exclusivement d'un problème localisé au niveau de l'oreille, alors que tout indique aujourd'hui que le problème est surtout neuronal.

protèse-auditiveLes acouphènes chroniques sont malaisés à traiter, d'autant, rappelons-le, que leur étiologie est souvent incertaine. En cas de perte auditive conjointe, le port d'un appareil auditif peut améliorer la situation de façon substantielle sur les deux tableaux. Pourquoi ? « Parce que la transmission d'une meilleure information sonore restimule les processus d'inhibition au niveau du cortex cérébral », explique le professeur Lefebvre.

La voie de l'inconscient

Prescrits de façon quasi systématique en phase débutante, les corticoïdes sont utilisés pour leurs propriétés anti-inflammatoires, dans la mesure où l'on suspecte assez fréquemment que l'acouphène est apparu à la suite d'une atteinte initiale au niveau auditif - traumatisme sonore, surdité brusque, etc. Ce sont pratiquement les seuls médicaments à avoir fait la preuve d'une certaine efficacité sur les acouphènes en phase aiguë. Plusieurs autres approches médicamenteuses sont proposées dans le cadre des acouphènes chroniques, mais avec des succès mitigés : le magnésium, le Ginkgo biloba, des vasodilatateurs, des anticonvulsivants ou encore des anxiolytiques ou des antidépresseurs. Ainsi que le soulignait le professeur Lefebvre, il faudrait identifier des sous-groupes de patients pour espérer obtenir des résultats plus probants.

On recense en outre des traitements par laser, dont l'efficacité n'a été prouvée à ce jour dans aucune étude scientifique contre placebo. Une autre technique, invasive et réservée à des cas rigoureusement sélectionnés, repose sur l'implantation d'électrodes au niveau cérébral. Pratiquée en Belgique par le groupe du professeur Dirk De Ridder, de l'Université d'Anvers, cette approche déboucherait sur un résultat positif chez deux tiers des patients traités. « Les causes initiales de l’acouphène sont souvent liées à une atteinte périphérique neurosensorielle, c’est-à-dire touchant l’oreille et/ou le nerf auditif (trauma sonore, surdité brusque, ototoxicité...), commente Audrey Maudoux. Quand le cerveau ne reçoit plus certaines informations sensitives en provenance de la périphérie (on parle alors de désafférentation), il se produit une réorganisation fonctionnelle (principalement une hyperactivité) au niveau des zones cérébrales qui traitent, dans notre cas, des informations sonores. Dans le cadre des acouphènes, les électrodes implantées stimulent le cortex auditif. Cela a deux effets : premièrement, fournir une stimulation aux zones cérébrales qui n’en reçoivent plus de la périphérie (réafférentation) ; deuxièmement, stopper l’activité pathologique des zones impliquées dans la génération de l’acouphène (effet neuromodulateur). »

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