C'est en 1868 que notre connaissance de l'humanité a changé. Cette année-là, une équipe d'ouvriers élargit la route entre le village français des Eyzies-de-Tayac et la gare. Pour cela, ils doivent éroder le pied d'une falaise au lieu dit "Cro Magon". "Cro", signifie "creux" dans le Périgord et "Magnon" est simplement le nom du terrain où ce creux apparaissait, du nom d'un ermite qui y avait vécu. Les ouvriers y découvriront des squelettes très anciens qui vont révolutionner le savoir sur l'origine de l'homme. Car "Cro Magnon", comme on va appeler ces humains, nous ressemble étrangement, au contraire des hommes de Neandertal, leur contemporain. Ils sont grands (1,80 m), ont le front haut et plat, le menton saillant. En Europe, où il s'implante voici 40.000 ans en provenance d'Asie, il est notre ancêtre direct.

Marcel Otte, professeur d'archéologie préhistorique à l'ULg est un passionné de Cro Magnon. Le livre qu'il vient de publier à son sujet en témoigne à chaque page. C'est à cet ancêtre lointain, en effet, que nous devons notre société. Il est le premier à se sédentariser, s'affranchissant ainsi de la nature, une étape cruciale de l'humanité. Ses rapports à la mort gouvernent sa vie; il est le créateur de la beauté (songeons aux grottes d'Altamira et Lascaux). Son cousin Neandertal n'a pas résisté à un tel choc culturel.

OTTE M., Cro-Magnon, Editions Perrin, 2008.