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Le secret des «sœurs Arabettes»
04/07/2008

Dépolluer les sols et améliorer la qualité nutritive des végétaux

Comprendre le processus naturel d’accumulation et de stockage des métaux pourrait permettre à terme de transférer ces propriétés à des plantes qui en sont dépourvues. Dans quel intérêt ? La capacité d’absorber les métaux montre un double intérêt : la phytoremédiation et la biofortification. La phytoremédiation consiste à dépolluer les sols, naturellement pollués ou contaminés par l’activité humaine, à l’aide de végétaux. Pour ce faire, l’idéal serait de transférer les capacités de l’Arabette de Haller à des plantes qui croissent très rapidement et en profondeur dans le sol.

Quant à la biofortification, il s’agit d’une recherche qui vise à produire des variétés de plantes enrichies en nutriments (en fer, en zinc et en vitamine A notamment) afin de bonifier leur qualité nutritive. Ce processus pourrait donc permettre d’améliorer l’alimentation et dès lors la santé humaine. Une opportunité non négligeable lorsqu’on sait, par exemple, que 30 à 40% de la population mondiale montre une carence en zinc.

Enfin, découvrir comment les plantes métallophytes absorbent et stockent les métaux dans leurs feuilles pourrait également mener à l’élimination des métaux toxiques, pour les végétaux et pour l’homme. A titre d’exemple : le tabac accumule beaucoup de cadmium au niveau de ses feuilles. Ainsi, un fumeur absorbe le double de ce métal par rapport à un non fumeur…

Les triplés hyperactifs de l’Arabette de Haller

Evolution Zinc FRPour vérifier le rôle crucial du gène HMA4 dans l’accumulation du zinc et du cadmium chez A. halleri, Marc Hanikenne et ses collègues ont utilisé la technique de l’interférence ARN. «Cette technique consiste à créer un ARN interférent en boucle et complémentaire à l’ARN messager naturellement produit par la cellule pour traduire le gène en protéines», explique le chercheur. «Une fois introduit dans la cellule, l’expression de cet ARN en boucle, provoque alors la destruction par la cellule des ARN messager du gène cible. Son expression est par conséquent inhibée» précise-t-il.

Grâce à cette technique, les scientifiques ont pu diminuer l’expression d’HMA4 chez A. halleri de 90%. Résultat : l’Arabette de Haller ne tolérait et n’accumulait plus du tout les métaux. Un constat qui a permis de confirmer l’importance du gène HMA4 dans les mécanismes d’hypertolérance et d’hyperaccumulation chez cette plante.

La seconde étape de cette étude consistait à élucider les raisons de la surexpression de ce gène chez l’Arabette de Haller, puisque HMA4 est 50 fois plus exprimé chez celle-ci que chez l’Arabette des Dames.

En comparant le génome des deux «sœurs», Marc Hanikenne et ses collègues ont découvert que le fameux gène était tripliqué chez A. halleri. «Après le séquençage de 300.000 paires de bases du génome de A. halleri, nous avons observé qu’elle possédait 3 copies du gène HMA4 qui se succèdent en tandem, pour une unique copie chez A. thaliana», indique le biologiste.

Cette triplication explique donc pourquoi le gène pourrait être 3 fois plus exprimé chez l’Arabette de Haller. Mais quelle autre astuce cette plante a-t-elle trouvé pour atteindre un niveau d’expression tellement plus haut que sa frangine ?

 

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