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Les wallons à Versailles
16/04/2008

«Belle Liégeoise»

Mais il n’y a pas que les armes qui parlent, les ambassadeurs aussi. Chargé de cours à l’Université, Daniel Droixhe dresse le portrait de l’un d’eux, le chevalier de Heusy, représentant du Prince-évêque de Liège à la cour de Versailles. Ce n’est cependant pas pour son action diplomatique que Daniel Droixhe l’épingle ici, mais pour le regard «éclairé» qu’il jette sur les classes les plus laborieuses de la Principauté. Dans un essai publié en 1773, consacré à l’établissement d’un hôpital général, il y indique clairement que bien des pauvres n’ont aucune envie de continuer à pratiquer le métier de gueux, mais que beaucoup préféreraient travailler s’ils trouvaient ainsi les moyens de subsistance pour eux et leur famille. Même si, pour lutter contre cette pauvreté, il suggère de séparer les oisifs du reste de la population, de les éduquer (quelque peu de force, par exemple les petites filles seraient formées à la filature) et surtout de leur ôter tout ce qu’il présente comme autant d’occasions de corruption : repos, loisirs, religion et argent. De l’aide, oui, mais uniquement en nature, sous forme de pain ou de logement par exemple.

de Terwagne FR

Le professeur Philippe Raxhon, pour sa part, nous entraîne à la suite d’une «amazone liégeoise», Anne Josèphe Terwagne, dite Théroigne de Méricourt. Il constate le rôle que l’historiographie lui fait jouer dans la marche sur Versailles d’octobre 1789. Un rôle disproportionné, souligne Philippe Raxhon, qui participe à la naissance du mythe de la «Belle Liégeoise». Le fait historique est la marche des femmes qui, le 5 octobre 1789, quittent les Halles de Paris et se dirigent vers Versailles pour réclamer du pain au Roi. C’est le prélude au retour du Roi dans la capitale française. Mais la belle Théroigne n’y est pas –contrairement à ce que décrivent certains récits enflammés-, elle est à Paris où elle préfère fréquenter les tribunes de l’Assemblée constituante. Par contre, elle participe bien à la prise des Tuileries le 10 août 1792, qui signe la fin de la monarchie. Accusée d’être trop proche des Girondins, elle sera fouettée en public l’année suivante. Elle sombre ensuite dans la folie. Une participation à la Révolution somme toute très modeste, mais qui sera compensée par l’exploitation de sa légende. Du moins en France car, comme le constate Raxhon, l’historiographie belge est, elle, bien plus discrète et jusqu’à l’année du bicentenaire de la Révolution, Liège et la Wallonie sont loin d’avoir voué un culte à la «Belle Liégeoise».

La deuxième partie de l’ouvrage, consacrée aux techniques, commence par une synthèse du Professeur Robert Halleux, qui porte sur les échanges scientifiques et techniques entre la France et le pays de Liège au XVIIè siècle. D’emblée, on est prévenu : il y a une différence importante entre sciences et techniques. Côté scientifique, la cour savante du Prince Evêque Ernest de Bavière, une des plus brillantes d’Europe, s’est dispersée avec sa mort en 1612. En outre, note Robert Halleux, l’élite intellectuelle de la principauté a été muselée par la condamnation de Galilée en 1634. Il n’y a guère que le visétois François-René de Sluse, juriste et mathématicien, correspondant de Pascal, qui émerge quelque peu.

Par contre, les techniques qui tournent autour de l’industrie métallurgique connaissent un essor considérable, font figure de référence internationale et essaiment dans toute l’Europe.

 

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