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Posidonies sous surveillance
07/06/2012

Des telles mesures de production primaire par suivi des concentrations d'oxygène existent déjà, issues de pas moins de 123 sites sur le globe dans divers herbiers, dont 2 sites en Méditerranée en plus de celui de Stareso, la station de recherches océanographiques de l’ULg à Calvi. De manière générale, ces mesures sont effectuées manuellement grâce à une cloche fermée posée à même l'herbier et à l'intérieur de laquelle sont mesurées les variations d'oxygène. Cette approche réclame toutefois des moyens humains et financiers considérables, et ne permet pas de réaliser des acquisitions de données à une haute fréquence. Ces acquisitions ont lieu toutes les quelques semaines dans le meilleur des cas, et durant des périodes trop courtes pour pouvoir renseigner le chercheur sur les variations d’une année sur l’autre ou à long-terme de concentration d'oxygène. « Au-delà, la pose d'une cloche sur l'herbier est intrusive — elle endommage l'herbier — et biaise inévitablement les résultats du fait du confinement de l'herbier dans un volume d'eau déterminé. En dernière analyse, ces méthodes classiques, pourtant coûteuses, tendent à sous-estimer les valeurs et, in fine, à n'offrir au chercheur qu'une idée grossière de la dynamique des herbiers », avertit Alberto Borges.

Acquisition en continu

Mais depuis le début des années 2000, l'existence de capteurs sophistiqués (optodes) permet désormais de mesurer de manière fiable, et sur une très longue durée, les concentrations d'oxygène dans les colonnes d'eau. « Aux méthodes classiques, nous avons préféré une approche consistant à déployer sur une ligne de mouillage de 10 mètres — c'est-à-dire une ligne maintenue en tension par un poids et des flotteurs, depuis la surface jusqu'au fond de l'eau — un certain nombre de capteurs (un à 9 mètres de profondeur, un autre à une profondeur intermédiaire de 7,5 mètres et un troisième à 5 mètres) ». Pendant plus de trois ans, entre août 2006 et octobre 2009, et à un coût comparativement faible, les capteurs en place ont ainsi permis l'acquisition en continu, 365 jours par an, de valeurs de production primaire et de respiration de l'écosystème. « Nous avons été les premiers à mener une étude de si longue haleine, avec un matériel fiable et non intrusif, à accumuler une quantité de données aussi importante, et à les comparer à celles obtenues par nous via la méthode plus conventionnelle de la cloche. Nous détenons aujourd'hui la meilleure résolution saisonnière jamais réalisée sur un herbier ». Optode-FRL'observation de longue durée permet en outre d'observer des phénomènes extrêmes et rares tels que des « années exceptionnelles » — une année particulièrement chaude, par exemple — et ainsi de donner une idée de la manière dont pourra se comporter un écosystème dans le futur. « Dans un siècle par exemple, lorsque la température moyenne aura augmenté sous le coup du réchauffement climatique. Or, explique Alberto Borges, nous avons eu cette chance. Nous avons déployé notre mouillage en août 2006, et l'hiver qui a suivi fut l'hiver le plus doux jamais enregistré en Europe depuis 500 ans. Conséquence: si l’hiver plus chaud n'a, en réalité, pas vraiment affecté nos mesures (et pour cause: l'herbier de posidonie est en dormance à cette saison, c'est-à-dire que son cycle de croissance est interrompu), le fait que la Méditerranée ait connu très peu de tempêtes au cours de cette période est, en revanche, tout à fait intéressant ».

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