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Quand la poésie se fait quotidienne respiration...
08/06/2012

Robert Guiette entame alors un parcours qui le mène d'abord comme stagiaire à la Bibliothèque royale, puis comme professeur  à l'Université de Gand – ordinaire à partir de 1937 –, charge à laquelle s'ajouteront les cours de français qu'il dispensera entre 1944 et 1946 à l'Institut supérieur de commerce d'Anvers. Et son élection le 9 janvier 1954 à l'Académie royale de Langue et de Littérature françaises de Belgique, il la doit essentiellement aux éditions savantes et autres études critiques de textes médiévaux, ainsi qu'à des traductions d'écrits du moyen néerlandais, dont il  sera  le minutieux auteur.

Philologue tôt distingué par ses pairs, Guiette fut aussi un poète reconnu qui ne resta pas insensible à la modernité. Dès son séjour dans la Ville Lumière, en effet, il entre notamment en contact avec André Salmon et Pierre-Jean Jouve, mais surtout Blaise Cendrars et Max Jacob.  Ces deux derniers exerceront sur son jeune talent mal dégrossi, encore tout imprégné d'un symbolisme où trône Emile Verhaeren, une influence déterminante : ses poèmes intitulés « Masque » portent l'empreinte du premier, auquel il voue une admiration fervente et en qui il voit « le plus fécond des conteurs » ; au second, à propos de qui il se posera la question « L'histoire reconnaîtra-t-elle tout ce que lui doit la poésie de son siècle ? », il consacrera une biographie intitulée Vie de Max Jacob, partiellement parue en 1934 et publiée in extenso quelques semaines avant sa mort survenue le 8 novembre 1976.

Un autre poète, lui aussi prénommé Max, le marquera profondément. Il s'agit de l'Anversois Elskamp, chantre de la vie populaire de la Flandre maritime de qui il fera connaître une partie de la correspondance littéraire ainsi qu'une sélection de poèmes, laquelle paraîtra en 1955 dans la collection « Poètes d'aujourd'hui » de Pierre Seghers, précédée d'une judicieuse analyse. On peut y voir un signe évident de l'intérêt que, en plus de la littérature ancienne, il n'a cessé de porter aux écrits de ses compatriotes. En témoignent son anthologie Poètes français de Belgique. De Verhaeren au surréalisme (1948), malheureusement épuisée, ainsi que les articles figurant dans l'une ou l'autre revue et où se décèlent ses préférences en matière de poésie : Jean De Bosschère, Henri Michaux, Odilon-Jean Périer. Trio auquel il convient d'ajouter Franz Hellens, que Guiette côtoie un temps au sein de la rédaction de la revue d'avant-garde Le Disque vert

« Un homme exilé de lui-même... »

Robert-Guiette

Quant à sa poésie propre, il est permis d'en saisir certains fondamentaux par la façon dont il se présente lui-même, en une confession non dénuée de hauteur de vues : « Pour ce poète, seules importent Solitude et Vie intérieure. Tout est simplicité à qui veut ne pas être dupe. Peu de paroles, mais brèves, incisives, acides. Le cri où tout l'être se tend, conscient-inconscient, chair et esprit. La densité, croit-il, n'exclut pas l'émotion. » Introspection qui se poursuit en ces termes : « Par dessus tout l'absorbe la vie intérieure. Aussi ne cache-t-il pas son goût pour le secret d'une existence retirée. » Dans une autre note enfin, il se définit comme suit : « Un homme exilé de lui-même par la vie. »

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