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Dauphins, baleines et pollution humaine
13/02/2017

Les baleines à bosse des eaux chaudes de l’Océan Indien révèlent la pollution de … l’Antarctique ! 

Les baleines à bosse sont de très grandes voyageuses ! Elles peuvent être aperçues dans toutes les mers du globe en ce compris l’Océan Indien. Elles profitent des eaux chaudes de l’île de la Réunion entre les mois de juin et de novembre dans lesquelles elles viennent mettre bas et allaiter leur petit. Le reste de l’année, les baleines sont présentes au large de l’Antarctique à plus de 8000 km de l’île de la Réunion ! C’est dans ces eaux froides que les baleines vont se nourrir, majoritairement de krill, une petite espèce de crustacé très appréciée de ces grands mammifères ! Krishna Das en collaboration avec notamment le Groupe Local d'Observation et d'Identification des Cétacés (GLOBICE, Dr. V. Dulau) et le Toxicological Centre de l’université d’Anvers (Pr. A. Covaci) se sont intéressés à l’exposition aux polluants des baleines à bosse échantillonnées autour de l’île de la Réunion (2).  

Biopsie baleines bosse

Comme les baleines à bosse se nourrissent majoritairement dans les eaux australes (et pas dans l’Océan Indien), elles accumulent dans leurs tissus les polluants présents en Antarctique. Et oui, malgré le fait que l’Antarctique soit éloigné des activités humaines, on peut tout de même détecter chez de nombreuses espèces marines des polluants industriels et des pesticides produits et utilisés à plusieurs milliers de kilomètres de là. 

Et les baleines à bosse de l’Océan Indien ne sont malheureusement pas épargnées ! Les chercheurs ont retrouvé dans leur lard des concentrations détectables de pesticides, mais également des molécules à usage industriels (polychlorobiphényles, PCBs) et des retardateurs de flamme (polybromodiphényléthers, PBDEs), utilisés pour leur propriété ignifuge! L’utilisation de ces polluants est interdite mais ces molécules organiques comme sont très résistantes, ne se dégradent pas et s’accumulent dans les organismes vivants. 

Les baleines à bosse de l’Océan Indien sont toutefois moins contaminées que leurs congénères de l’hémisphère nord car elles consomment majoritairement du krill et occupent par conséquent une position plus basse dans le réseau trophique (les baleines du nord mangent aussi du poisson !)En outre, les baleines à bosse de l’hémisphère sud, sont plus éloignées des activités humaines majoritairement localisées dans l’hémisphère nord. 

Autre fait intéressant : la variabilité des concentrations en polluants chez les baleines de l’hémisphère sud. En comparant les résultats avec plusieurs études précédentes, les chercheurs se sont aperçus que malgré une contamination plus faible des écosystèmes antarctiques, certaines baleines pouvaient présenter des niveaux relativement élevés. Les raisons sont multiples : âge, sexe, régime alimentaire, redistribution des polluants organiques lors de leur migration et lors de la mise-bas et de l’allaitement. Les baleines à bosse de l’hémisphère sud ne se nourrissent pas ou peu durant leur séjour à l’île de la Réunion et leurs trajets aller et retour. Un vrai défi physiologique et un modèle toxicologique assez unique ! 

(2) Linking pollutant exposure of humpback whales breeding in the Indian Ocean to their feeding habits and feeding areas off Antarctica, Das K. et al. Environmental Pollution, Jan. 2017. 

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