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Les champs sous l’œil des satellites

17/02/2017

Connaître à l’avance le rendement d’une culture sera bientôt possible pour les agriculteurs. Dans le cadre du projet BELCAM (Belgian Collaborative Agriculture Monitoring), le département des sciences et gestion de l’environnement de l’Université de Liège s’intéresse à des outils capables de prévoir à l’avance la production d’une récolte.

Financé par Belspo et piloté par l’Université Catholique de Louvain, BELCAM voit le jour en 2014. Il vise à exploiter les nouveaux systèmes d’observation de la Terre dans le domaine agricole. Plusieurs partenaires belges et français collaborent actuellement au projet, dont le département des sciences et gestion de l’environnement del’Université de Liège.

« Chacun a son rôle spécifique. À l’ULg, nous nous intéressons à la prévision des rendements agricoles. Pour ce faire, nous combinons des images satellites à un logiciel de simulation de croissance » indique Joost Wellens, ingénieur agronome et coordinateur du projet pour l’ULg.

Plateforme BELCAM

Une sentinelle dans le ciel

Tous les 10 jours, le Dr. Wellens reçoit des images satellites des parcelles agricoles belges capturées par le satellite européen « Sentinel-2 ». Son jumeau sera envoyé à ses côtés en 2017, ce qui permettra au chercheur de recevoir ces images tous les 5 jours. Lancé en 2015, Sentinel-2 fournit des images gratuitement à quiconque en fait la demande. Une aubaine pour les scientifiques : « Avant le lancement de Sentinel-2, ces images étaient très chères. Il fallait débourser entre 2000 et 3000 € pour obtenir des images satellites d’une petite zone. Des images gratuites existaient, mais leur précision était assez médiocre, ne permettant pas un suivi au niveau de la parcelle. » précise le Dr. Wellens.

L’emploi d’images satellites présente toutefois un inconvénient majeur. « Si le ciel est couvert, on ne voit plus rien. Et donc on ne peut pas faire de prévisions ». C’est ici qu’entre en jeu le logiciel de simulation. « On peut résoudre ce problème en combinant les images satellites exploitables avec un logiciel de simulation. Qui va donc simuler ce qu’il se passe entre deux images. Et si nous voyons qu’il a fait des erreurs, on corrige à chaque fois le programme » explique le scientifique.Actuellement, les chercheurs utilisent le logiciel « AquaCrop », proposé en libre accès par l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Aquacrop est capable de calculer l’évolution de la canopée, à savoir sa vitesse de développement et de déclin, et les stades phénologiques des végétaux. Avec ces informations, le logiciel peut prédire si une culture sera ou non rentable.

Un projet liant chercheur et agriculteur 

Cela servira à améliorer la méthode de production des agriculteurs avec qui les chercheurs du projet collaborent étroitement. « Nous avons créé une plateforme sur internet où l’agriculteur peut s’inscrire et fournir des données sur sa production. Il y délimite sa parcelle via une image satellite, précise le type de culture semée (maïs, froment d’hiver ou pomme de terre par exemple), indique la date de semis ainsi que les doses d’engrais répandus et toute autre information sur le développement de la culture » explique Joost Wellens. Une coopération essentielle selon le chercheur car « plus nous avons de données, plus nos modèles de prévision sont fiables, et meilleurs sont nos conseils aux agriculteurs ».

Ces derniers sont par exemple informés de la rentabilité de leurs récoltes comparée à la moyenne de celle des autres terrains de leur région. Si nécessaire, des recommandations pourraient leurs être  données pour augmenter leur productivité. 

BELCAM couverture foliacée
Graphique simulant la couverture foliacée - Logiciel Aquacorp

Des outils à disposition de tous

Côté résultat, l’outil apparaît efficace. Les chercheurs du projet notent ainsi une corrélation entre le rendement agricole observé sur le terrain, et celui simulé par le logiciel. Avec une marge d’erreur d’1,6 tonne/ha pour le maïs (en matière sèche). Et 0,9 tonne/ha (matière sèche) concernant le froment d’hiver et les pommes de terre. « D’ici la fin du projet, en 2019, nous espérons diminuer ce seuil d’erreur. Et pour cela, il faut convaincre davantage d’agriculteurs de partager leurs données en ligne ».

L’autre volet du projet à améliorer à l’avenir sera la « détection des anomalies ». « Nos modèles de prévisions fonctionnent quand on se trouve dans des situations dites « normales ». Mais ce qui intéresse surtout l’agriculteur est ce qu’il se passera pour sa récolte en cas de problèmes. Une sécheresse ou des fortes pluies par exemple. Davantage de recherches sur ce sujet doivent donc être réalisées » concède Joost Wellens. À terme, l’équipe espère que ces outils seront utilisés par tous les centres pilotes belges qui conseillent actuellement les agriculteurs. « Si cela est possible, nous tenterons à la fin du projet de créer une application gratuite exploitable pour l’ensemble du monde agricole » conclut le scientifique.


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