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Tumeur cérébrale : cibler les cellules résistantes

01/02/2017

Tumeur particulièrement agressive et résistante, le glioblastome répond mal aux traitements. Des chercheurs de l’Université de Liège ont montré comment rendre plus vulnérables des cellules tumorales résistantes à la radiothérapie qui se nichent dans des zones particulières du cerveau.

93e2b tumor-cerebral1« Tumeur », un terme que l’on redoute et qui fait frissonner du simple fait de son énonciation. Parfois à tort puisque, contrairement aux idées reçues, il ne désigne pas forcément une pathologie cancéreuse. Il s’agit de la multiplication anormale de cellules au sein d’un tissu des suites d’un dysfonctionnement du développement cellulaire. Une tumeur peut être bénigne ou maligne selon la nature des cellules qui la composent. Dans le cas du glioblastome (GBM) cependant, la tumeur atteint le paroxysme de son caractère terrifiant. En effet, cette tumeur - qui est la plus fréquente et la plus agressive du système nerveux central – est foudroyante. Une fois le diagnostic tombé, très peu de patients (5%) survivent au-delà de 3 ans et la moitié d’entre eux est emportée par la maladie au cours de l’année du diagnostic. Ce qui renforce encore davantage l’aspect effrayant de cette tumeur est qu’elle frappe de manière sporadique. Dans de très rares cas, elle survient dans le contexte de maladies génétiques familiales mais, dans la majorité des cas, aucun facteur de risque ne peut être associé à la maladie. 

Le glioblastome est une tumeur qui touche les cellules gliales, des cellules de soutien qui se trouvent au côté des neurones dans le cerveau. Si les causes moléculaires de l’apparition du glioblastome ne sont pas (encore) élucidées, elle pourrait résulter de mutations se produisant au sein de cellules dites souches à partir desquelles les neurones et les cellules gliales se différencient. A l’heure d’aujourd’hui, le traitement de cette pathologie consiste en une opération chirurgicale pour retirer la tumeur - lorsque les circonstances le permettent - suivie de séances de radio- et chimiothérapie. Mais les rechutes sont quasi inévitables. En 2010, une avancée majeure réalisée dans le domaine a permis de mettre en lumière quatre classes distinctes de glioblastomes : « classique », « neural », « proneural » et « mésenchymateux ». Chacune possédant des caractéristiques propres liées à l’expression de certaines protéines ou la présence de certaines mutations au sein des cellules de la tumeur. Le glioblastome mésenchymateux, le plus agressif et le plus résistant aux traitements, est par exemple caractérisé par l’expression de protéines telles que la Vimentine ou la N-Cadhérine que l’on ne retrouve pas (ou très faiblement) dans les autres classes. L’avantage de cette classification est qu’elle permet de « prédire » une éventuelle réponse au traitement ainsi que d’avoir une idée de l’agressivité du glioblastome développé par le patient.

Une zone refuge qui renforce la résistance des cellules

La cause des rechutes est liée à la présence de cellules dites « initiatrices » de glioblastome qui résistent aux modalités thérapeutiques. Une équipe pluridisciplinaire du GIGA, menée par Nicolas Goffart et supervisée par le Professeur Bernard Rogister, a démontré que ces cellules résistantes migrent préférentiellement vers des régions tout à fait particulières du cerveau, parmi lesquelles on compte la zone sous-ventriculaire. Situées à distance du cœur de la tumeur, ces cellules échapperaient à l’acte chirurgical et pourraient activement participer au phénomène de rechutes tumorales. Mais pourquoi résistent-t-elles à la radio-et chimiothérapie ? C’est ce qu’ont voulu savoir Nicolas Goffart et Arnaud Lombard, post-doctorant et doctorant au « Laboratory of nervous Disorders and Therapy » du GIGA-Neurosciences. Dans le cadre d’une étude publiée récemment dans la revue Neuro-Oncology (1), ils ont creusé le rôle que pourrait jouer la zone sous-ventriculaire du cerveau  dans la radio-résistance des cellules initiatrices du glioblastome, et donc dans la rechute tumorale. Leurs investigations ont permis de mettre en évidence que les cellules initiatrices de glioblastomes qui se logent au sein de cette zone sont plus résistantes à la radiothérapie. En effet, leur caractère mésenchymateux y est renforcé par l’action d’une chimiokine (CXCL12) présente dans cet environnement. 

Goffart Lombard GIGA

Lorsque les chercheurs inhibent la voie médiée par cette chimiokine, ils limitent l’expression des protéines Vimentine et N-Cadhérine au niveau des cellules tumorales et les rendent ainsi plus vulnérables face à la radiothérapie. Ces résultats suggèrent qu’une  approche combinant radiothérapie et inhibiteurs de la voie médiée par la chimiokine en question permettrait vraisemblablement d’augmenter l’efficacité des traitements actuels du Glioblastome. Une tumeur certes effrayante et résistante mais face à laquelle les chercheurs de l’ULg ne manquent pas d’idées et de pistes pour en venir à bout (lire aussi Tumeur cérébrale : combattre ma récidive). 

(1) Goffart N, Lombard A, Lallemand F, Kroonen J, Nassen J, Di Valentin E, Berendsen S, Dedobbeleer M, Willems E, Robe P, Bours V, Martin D, Martinive P, Maquet P and Rogister B. CXCL12 mediates glioblastoma resistance to radiotherapy in the subventricular zone. Neuro Oncol. 2016.


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