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Rendez-vous avec Vénus
14/05/2012

4.4. Résultats

Trajet-VenusLe transit de 1769 suscita un intérêt encore plus grand que le précédent : sont répertoriés pas moins de 151 observateurs différents répartis en 77 sites. Mais cette fois, la France perd la première place : avec 34 observateurs – un chiffre pourtant plus élevé qu’en 1761 –, elle est loin derrière le Royaume-Uni (69 observateurs !… grâce, il est vrai, à l’aide précieuse et indépendante des colons américains). Bien que certains de ces observateurs avaient pu s’entraîner lors du transit précédent, il faut bien avouer que les résultats ne furent pas bien meilleurs – l’effet de goutte noire et l’incertitude sur les longitudes continuaient à poser problème. On arriva à une parallaxe variant d’un pays à l’autre de 8,4 à 8,8 secondes d’arc (soit une distance au Soleil de 149,5 à 156,6 millions de kilomètres), et les débats firent rage à travers le monde pour savoir qui avait raison…

Mais les scientifiques d’alors ne possédaient pas certains outils mathématiques de nature à leur faciliter la tâche, comme l’utilisation de méthodes du type « moindres carrés ». Au XIXe siècle, en utilisant ces nouvelles techniques pour combiner les mesures du siècle précédent, en corrigeant certaines erreurs et en attribuant un poids moindre aux données les plus incertaines, l’astronome Johann Franz Encke déduisit que les deux transits du Siècle des Lumières conduisaient à une valeur de la parallaxe solaire de 8,5776 secondes d’arc, soit une valeur plus petite de 2,5% par rapport à la valeur moderne. Néanmoins, on était en droit d’espérer plus de précision encore pour une donnée aussi fondamentale.

5. L’Amour au temps des Romantiques

Au XIXe siècle, la détermination des longitudes s’améliore et de nouvelles techniques, telle la photographie, apparaissent. Néanmoins, le monde scientifique ne parvient pas à se mettre d’accord sur la valeur de la distance entre la Terre et le Soleil. L’engouement pour Vénus se ravive donc.

simulateur-TransitPour tenter d’améliorer la précision, on procède à diverses expériences préliminaires. On remarque que le chronométrage d’un instant donné diffère d’une personne à l’autre, parfois de plusieurs dixièmes de seconde – une différence que l’on tente de corriger grâce à une « équation personnelle » établie pour chaque observateur. En outre, on ne lésine pas sur l’entraînement ; en France, Charles Wolf dispose lampes et écrans à la fenêtre d’une bibliothèque située dans les jardins du Luxembourg pour reproduire artificiellement un transit. Il fait examiner ce montage depuis l’observatoire de Paris… Les Américains, désormais indépendants, construisent eux aussi un simulateur de transit devant le département de la Guerre à Washington. Tout astronome désireux de participer aux mesures doit s’entraîner à contempler ce dispositif  depuis l’observatoire naval, situé à un kilomètre de là. En outre, on décide d’utiliser les techniques photographiques (6) : l’œil impersonnel de la caméra éliminera, pense-t-on alors, toutes les erreurs humaines.

• 1874
Enfin prêts, les astronomes choisissent leurs destinations. Sous la houlette de Georges Airy, les Anglais envoient cinq expéditions à travers le monde, destinées à acheminer les astronomes vers huit stations bien choisies : une à Alexandrie (Égypte), une en Nouvelle- Zélande, une à l’île Rodrigue (en hommage à Pingré ?), deux aux îles Kerguelen, et trois à Hawaii. visibilité-transti1874En plus, une expédition privée, conduite par Lord James Ludovic Lindsay, se déploiera à l’île Maurice (ex île de France) ; le navire de Lindsay sera baptisé fort opportunément « Vénus ». Les expéditions anglaises auront au moins une retombée – un désastre écologique aux îles Kerguelen : les honorables astronomes de Sa Majesté y ont malencontreusement lâché des lapins…

Attente-transit-HawaiiLa Russie installe une petite trentaine d’observatoires sur l’ensemble de son territoire, de la Mer Noire à la Mer du Japon. L’observatoire naval américain (USNO) se décide pour sept stations, dont trois dans l’hémisphère boréal (Pékin, Vladivostok et Nagasaki). James Watson, qui s’est établi à Pékin pour observer le transit, découvre un astéroïde, qu’il baptise en l’honneur de ses hôtes Shui Hua Hsing (l’étoile chinoise de bon augure). Le découvreur des lunes de Mars, Asaph Hall, est envoyé à Vladivostok. L’hiver sibérien n’est pas tendre pour Hall : les lubrifiants gèlent, le toit menace de s’envoler sous les rafales d’un vent tempétueux, et les appareils photographiques sont inutilisables… Cinq des missions américaines de 1874 se déroulent dans l’hémisphère Sud, mais une tempête les oblige à abandonner l’un des sites, et le temps est couvert pour toutes ces missions australes, sauf celle organisée en Nouvelle- Zélande. Friands de nouvelles technologies, les Américains réussissent à obtenir 200 photos de la danse de Vénus devant le Soleil…

(6) Avec les photos, on ne mesure plus la durée du transit, mais la position de Vénus au cours de son trajet.

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