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Une super-Terre mise en lumière
05/10/2012

En effet, une planète si proche de son étoile est piégée dans un état de résonance. C’est-à-dire qu’elle tourne sur elle-même à la même vitesse que sa période orbitale et va donc toujours montrer une même face à l’étoile. Exactement de la même manière que la lune pour la Terre. « Ce qui signifie qu’il y a un hémisphère continuellement irradié et un hémisphère dans une nuit perpétuelle, précise le chercheur. Entre ces deux hémisphères, il y a forcément une différence de température plus ou moins  importante selon l’efficacité du transfert de la chaleur du côté jour vers le côté nuit. L’émission que nous mesurons correspond au côté jour, et sa valeur élevée favorise une forte différence de température avec le côté nuit, et donc un transfert de chaleur peu efficace entre les deux hémisphères. En effet, si ce transfert était efficace, le côté nuit ne stockerait pas autant de chaleur et son émission serait plus faible. »

Pionnier dans l’étude des planètes telluriques

L’émission lumineuse avait déjà été mesurée sur des planètes beaucoup plus grosses, rappelant les tailles de Neptune ou de Jupiter. Mais c’est la toute première fois que cette mesure a été rendue possible pour une super-Terre. « Pour étudier plus en détail des astres aussi éloignés et de plus petite taille encore, se réjouit Michaël Gillon, il faudra attendre la mise en service du télescope spatial JWST (James Webb Space Telescope, Ndlr), le remplaçant de Hubble. Son diamètre fera 6,5 mètres de large, là où Spitzer ne fait que 85 centimètres. JWST, qui ne sera pas lancé vers l’espace avant 2018 au plus tôt, promettra donc des mesures beaucoup plus précises et couvrant un spectre de longueurs d’ondes beaucoup plus important. Cela permettra une étude beaucoup plus poussée de planètes  comme 55 Cancri e, et également l’étude de planètes plus petites, plus froides et plus éloignées de la Terre. Ce sera une véritable révolution, tout comme Spitzer a initié une révolution en son temps dans l’étude des planètes en transit. » Etude qui demeure aujourd’hui l’un des moyens les plus efficaces pour dénicher de nouvelles planètes. « Bien sûr, il existe des techniques d’imagerie directe, qui parviennent à séparer dans une même image l’étoile et la planète. Il y a donc dans ces cas-là une possibilité de détecter l’émission sans avoir besoin d’observer le transit de la planète. Mais ce sont des techniques très complexes qui se mettent lentement au point, et qui parviennent actuellement à n’étudier que des planètes géantes, très chaudes, massives, relativement proches de nous, et orbitant assez loin de leur étoile. Ces technologies n’auraient par exemple pas permis notre découverte, la planète étant bien trop petite et bien trop proche de son étoile pour qu’on puisse nettement distinguer les deux flux sur une image. »

Toujours est-il qu’en étudiant 55 Cancri e, l’équipe de l’astrophysicien ouvre la voie à un tout nouveau pan de l’astrobiologie, celui de l’étude des planètes telluriques, de petite taille. «Ce résultat est stimulant et nous encourage à redoubler d’efforts. D’une part, il faut bien sûr continuer à repousser les limites de nos instruments pour pousser plus avant l’étude de ces petites exoplanètes. Mais le fait que cette première détection de l’émission d’une super-Terre concerne une planète en orbite autour d’une étoile proche n’est pas un hasard: plus l’étoile hôte est brillante et plus nos observations peuvent être précises. Il faut donc concentrer nos recherches de planètes en transit sur les étoiles les plus proches du système solaire. Ce n’est que comme cela que nous trouverons des planètes similaires à la Terre que nous pourrons vraiment étudier en détail avec nos futurs instruments. Dans ce contexte, nous militons pour une participation forte de la Belgique dans le projet CHEOPS qui est dirigé par la Suisse et qui vise à mettre sur orbite en 2017 un télescope spatial hyper-précis dédié à la recherche des transits de planètes telluriques en orbite autour d’étoiles du voisinage solaire.»

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