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Un salarié, ça se prête un peu, beaucoup, énormément…
02/05/2012

Une version belge de l’histoire

Retour à la Belgique. Pour son dispositif, notre pays s’est inspiré de la France, tout en adoptant une démarche différente. « La loi-programme de 2000 ne visait pas à encadrer des pratiques existantes mais, plutôt, à répondre au lobbying exercé par différents acteurs, qui étaient demandeurs d’une nouvelle exception à l’interdiction de mise à disposition des travailleurs. La première exception au principe interdisant de prêter des salariés est celle de l’intérim. Les GE ont été la deuxième », explique Virginie Xhauflair.

Groupement-employeursEn fait, le cadre légal belge s’avère relativement restrictif. En effet, le texte légal des GE prévoit « un dispositif qui organise la mise de travailleurs difficiles à placer à la disposition d’utilisateurs en vue de leur réinsertion dans le marché du travail ».  « Ce frein explique qu’en 2012, la Belgique ne compte que 3 GE, impliquant une quarantaine d’entreprises et une vingtaine de travailleurs », constate-t-elle.

Avant d’arriver à ce (petit) résultat, la route a cependant été longue et semée d’embûches. Le récit de l’anthropologue et de son investissement personnel dans la mise sur pied d’un des GE belges en témoigne. Mais il met en lumière, également, les atouts possibles de cette formule, tout comme les difficultés liées à leur développement et à leur valorisation.

Une histoire en construction 

Créé voici 25 ans par François Pichault, « le Lentic (le Laboratoire d'étude sur les nouvelles technologies, l'innovation et le changement, à l'Université de Liège) s’est intéressé aux Nouvelles technologies de l’information, puis aux Technologies de l’Information et de la Communication. Assez logiquement, il s’est ensuite penché sur les entreprises réseaux et les nouvelles formes d’organisation, souvent externalisées, qui émergeaient alors et dont faisaient partie, par exemple, le télétravail ou le développement des Ressources humaines par objectifs, une pratique qui conduit à gérer les employés comme des indépendants », rappelle Virginie Xhauflair.

A l’issue de ces recherches, en 2005, l’équipe du Lentic a posé un constat inquiétant : « Il nous est apparu que, face à la dérégulation du marché de l’emploi, nos pratiques de dialogue social et de protection des droits des travailleurs étaient de moins en moins adaptées. En effet, protéger les travailleurs ainsi que cela se faisait auparavant devenait plus difficile. Désormais, cette protection se concentre davantage sur celle de travailleurs privilégiés ou stratégiques, ceux qui ont une valeur importante dans le core-business. En revanche, ceux qui se trouvent en périphérie risquent d’être touchés par des statuts précaires, ou externalisés par la sous-traitance, ou réengagés comme indépendants… », poursuit-elle.

Au-delà de ce constat, l’équipe du Lentic s’est ensuite intéressée à l’émergence possible de nouvelles formes de régulation de l’emploi, dans des frontières organisationnelles différentes. Ainsi, par exemple, relate Virginie Xhauflair, « pour la ligne TGV Bruxelles-Cologne, il fallait construire un tunnel de plus de 6 kilomètres : plusieurs entreprises de génie civil, belges, françaises, allemandes et hollandaises s’étaient associées en réseau pour y parvenir. Un collectif de travail a pu être recréé sans tenir compte des frontières légales, avec un dialogue social de site, adapté aux besoins particuliers des travailleurs du chantier. Cette expérience a prouvé qu’une évolution des pratiques de dialogue social était possible.»

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